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#79 – Comment prendre soin du monde. Avec Dominique Méda
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Conversation avec la sociologue Dominique Méda.
Elle vient de publier “Une société désirable : Comment prendre soin du monde” aux éditions Flammarion, un livre dans lequel, elle déboulonne pas mal d’idée reçues sur le rapport des Français au travail et explicite les racines de l’idéologie néolibérale dont l’une des obsessions est de réduire à peau de chagrin la protection sociale attachée au salariat.
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Elle vient de publier “Une société désirable : Comment prendre soin du monde” aux éditions Flammarion, un livre dans lequel, elle déboulonne pas mal d’idée reçues sur le rapport des Français au travail et explicite les racines de l’idéologie néolibérale dont l’une des obsessions est de réduire à peau de chagrin la protection sociale attachée au salariat.
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×Émission proposée en partenariat avec buycycle.com : buycycle la market place pour acheter ou vendre son vélo d’occasion, ou reconditionné. Cherchez, trouvez, buycycle s’occupe du reste. Le code promo est là . Emission que vous pourrez également retrouver sur Weelz! En plateau – Julie Alunno et Frédéric Dupont Julie Alunno est Cheffe du programme AVELO 3 au sein de l’ADEME. Frédéric Dupont Chargé de communication à l’ADEME du Programme AVELO 3. L’ADEME est un acteur incontournable pour les EPCI (établissement Public de Coopération Intercommunales… L’acronyme technique pour dire que les communes discutent entre elles et portent des projets communs), quelles que soient leurs tailles, natures, leur position géographique pour les accompagner dans la mise en œuvre de leurs politiques cyclables. Les politiques cyclables peuvent passer par de l’aménagement, des infrastructures mais aussi des opérations moins “hard” et plus “soft” comme des opérations de promotion de l’usage du vélo auprès des citoyens. Aujourd’hui, au micro de Rayons Libres, un focus sur le programme Avélo3 et encore plus précisément, l’intérêt des journées des Rencontres à vélo. Six journées organisées en France. Qui permettent des rencontres, des échanges, des partages d’expériences. Des journées ouvertes à tous et toutes pour une vraie inclusion et réflexion commune. Pour que les différentes politiques cyclables deviennent une politique cyclable commune. Lyon : le 11 mars 2025 Toulouse : le 11 avril 2025 Angers : Le 5 juin 2025 Pour suivre l’actualité du programme avelo3, le mieux, filer là. Chronique Abel Guggenheim : Le charabia du vélo, un frein et un motif d’exclusion ! Musique : É Preciso Dar Um Jeito, Meu Amigo par Erasmo Carlos Réalisation : Jérôme Sorrel assisté d’Olivier Grieco (ou l’inverse !!) Envie d’être le ou la prochaine invitée ? Le prochain à causer dans le micro. Contactez-moi, sur Linkedin , X, Instagram , ici via l’onglet contact de la radio aussi : contact@libre-a-toi.org. Vous pouvez aussi nous contacter simplement pour nous dire tout le mal ou le bien que vous pensez de Rayons Libres.…
Promenons nous dans les bois … Pendant que le Loup n’y est pas … Le Loup est dans nos contes de ce soir. Sonia Tissot (Tisseuse de Rêves) Conte : La confidence au Carreau entretiens avec Sonia Tissot Conte : Jean-Loup Patrick Crespel Conte : Petit Bonhomme Vert Ariel Thiebaut Chronique : Ouvrir sa Gueule, d’après les légendes du Café associatif Le Gueulard Bérengère Charbonnier Conte : Le Loup Dévoreur Patrick Garcia Conte : Le M’neu d’Loup L’actualité des spectacles et des contes L’annuaire du conte sur paris, sa région par Patrick Crespel : Cabaret Contes Musique et illustrations sonores Aurora – Running With the Wolves Les Musiciens de Saint-Julien – Je mène les loups ; En passant la rivière ; Quand j’étais chez mon père … suite de bourrées Générique de l’émission : La Société Fraternelle de Cornemuses du Centre – Bourrée à Maryline Les Contes, C’est du Sérieux est rediffusé sur radio Uylenspiegel dans la région de Cassel.…
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1 #60 – Comment accompagner plus d’utilisatrices vers l’IA avec Alexia Toulmet 29:58
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Parlez-moi d’IA n°60, Comment accompagner plus d’utilisatrices vers l’IA avec Alexia Toulmet Dans cette émission de Parlez-moi d’IA, nous accueillons Alexia Toulmet, une jeune femme au parcours déterminé et inspirant. Réalisant d’abord un cheminement plutôt littéraire en étant diplômée de Sciences Po, Alexia décide d’écouter ses envies et de suivre le cursus de développeuse à l’école 42, un univers très technique où les femmes restaient encore très peu nombreuses. Aujourd’hui, Alexia partage son expérience de développeuse et d’entrepreneuse pour accompagner d’autres femmes à se sentir légitimes et outillées face aux technologies et à l’intelligence artificielle. Sa formation, intitulée Mei Mei, est un programme conçu par et pour les femmes, pour les aider à explorer et maîtriser ces outils à fort potentiel et exigeants. Que vous soyez curieux.se de découvrir un parcours original ou intéressé.e par des initiatives concrètes pour réduire les déséquilibre de genre dans la tech, cet épisode est une véritable bouffée d’inspiration. Écoutez l’interview complète pour découvrir : – Comment Alexia a trouvé sa voie dans un domaine encore majoritairement masculin. – Les clés qu’elle propose pour démystifier l’IA et encourager la confiance en elle des femmes qui veulent pratiquer la tech – Sa vision d’une tech plus féminine, inclusive et responsable. Cet épisode vous a plu, vous appréciez notre émission : Likez cet épisode , abonnez-vous à notre podcast sur toutes les bonnes plateformes et notez 5* sur Apple Podcast et Spotify pour nous aider à nous faire connaître Et vous, que pensez-vous de ces initiatives pour rendre l’IA plus féminine et inclusive ? À L’OREILLE Réalisation et Montage final : JPC / Mise en ligne : Olivier Grieco. Voix d’Eliza : Lisa Bretzner Ressources citées dans l’émission Le site de la formation à l’IA pour les femmes Mei Mei https://www.joinmeimei.com/ L’émission est également disponible chez les diffuseurs suivants : Youtube : https://youtu.be/T1A3PxaJx2o Spotify : https://open.spotify.com/show/3QaXD1il8s8fDUkoyAvTrH Deezer : https://deezer.com/show/1000288955 Appel Podcasts : https://podcasts.apple.com/fr/podcast/parlez-moi-dia/id1706654536 Pocket Casts : https://pca.st/9hjmbey7 PodcastAddict : https://podcastaddict.com/podcast/parlez-moi-d-ia-s-initier-et-comprendre-l-intelligence-artificielle/4676518 Transcriptions de Libre à lire ici : https://www.librealire.org/+-parlez-moi-d-ia-+ Aidez-nous à améliorer cette émission en répondant au questionnaire des auditeurs : https://linktw.in/RnCBIv Retrouvons-nous sur la chaîne whatApps de Parlez-moi d’IA pour partager des infos complémentaires et poser des questions. https://www.whatsapp.com/channel/0029VaJsvF7L2AU7dYaWLQ2Z…
S’abonner au podcast S’abonner à la newsletter Mehdi et Marianne 20e émission Chemins de traverse diffusée en direct mercredi 12 février 2025 à 22 h Notre invitée est Marianne Ravaud secrétaire de l’association caisse de solidarité . Elle aura l’occasion de nous parler de son parcours de militante ainsi que la genèse de l’association. La seconde partie de l’émission sera en lien avec les missions de l’association et de comment aident-ils les grévistes ainsi que les personnes victimes de discriminations. Ce dernier point fera l’objet de la 3e partie de l’émission et permettra de faire un parallèle avec l’actualité ( discours du Premier ministre sur Mayotte et la récente mise à pied du service public de l’humoriste Merwane Benlazar) . Sommaire Liens À l’oreille Intervenir en direct Nous contacter Liens À l’oreille Bad Bunny : Lo que le paso à Hawaï Linton Kwesi : Tap Natch Poet Schmaltz par Jahzzar (générique) Intervenir en direct Vous pouvez nous rejoindre sur le salon web de l’émission pour participer à notre discussion en direct, nous contacter ou nous laisser un commentaire. Pendant le direct, vous pouvez aussi nous appeler au 09 72 51 55 46…
J’ai fait des assiettes, on peut manger dedans. Picasso à André Malraux Si son art traverse depuis plus d’une vingtaine d’années les matières et les techniques, de la couture sur tôle à la sculpture et au dessin, de l’installation à la performance, et plus récemment, à la céramique, Benjamin Deguenon , traverse et se laisse traverser à son tour par les villes, par les villages, par l’environnement urbain qu’il observe pour en extraire les obsessions et les croyances, les nouvelles superstitions. La ville d’Abomey est le terroir de son enfance, Cotonou, sa terre d’accueil. Au Bénin. Les céramiques qu’il présente aujourd’hui à la Galerie Vallois à Paris, relient son passé et son présent, représentent le liant entre la terre rouge des Palais d’Abomey, les potiers de Sé, le village de ses vacances, et cette sorte de réalité fantastique que la ville de Cotonou offre à son regard. Liant entre les dieux et les hommes, trace durable de la vie spirituelle et matérielle d’une communauté, la céramique donne l’opportunité à Benjamin Deguenon de réinventer ses chimères qu’il dessine ou sculpte sur du bois ou du métal, avec cette terre qui a traversé souterraine, souveraine, son imaginaire. Son travail a pu être vu dans le cadre des grandes manifestations artistiques au siège de l’UNESCO, à la Villa Arson à Nice, Dak’Art, AKAA, à l’Institut français de Cotonou, par la galerie Vallois à Paris, et OpenArtExchange à Schiedam au Pays Bas, et fait partie des collections de la présidence au Bénin et dans des collections particulières un peu partout dans le monde. Le traversé, exposition de sculptures en céramiques, v isible du 6 au 1er mars 2025 à la Galerie Vallois, 41 rue de Seine, 6e à Paris. Horaires d’ouverture : 11h-19 du mardi au samedi.. Pour aller plus loin Thomas Sankara , « Un front uni contre la dette », discours prononcé à la 25e conférence des pays membres de l’OUA à Addis‐Abéba le 29 juillet 1987 Fabiola Badoi , (Ir)réalités , extrait article Stars du Bénin, 2011 À l’oreille Ambiance pure d’ Abomey (trouvaille sur you tube) Ala , Dagbo & International African Jazz Nabuco, Va pensiero , Le choeur des esclaves, Les choeurs de l’Opéra national de Paris, Giuseppe Verdi Jeff Buckley , Dido’s lament , d’après Henry Purcell À la technique, Isabelle Carrère…
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1 #60 – Indestructible (suite), Cœurs fugitifs et Arcanes 1:00:00
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« Le théâtre est un espace de rencontres : avec des êtres vivants et morts, avec les autres, avec soi. Et une rencontre, selon ce que nous décidons d’en faire, peut changer nos vies, nous donner force et douceur face au monde. » « Proposer aux spectateur•ice•s une expérience nouvelle, qui les fasse basculer hors du temps quotidien, crée une zone de magie et de fantaisie, teintée d’humour, associée à des sujets graves du réel et des combats majeurs du féminisme (violences sexistes, sexuelles, patriarcales, santé mentale…). » — Manon Worms – Krasna, compagnie d’arts vivants à Marseille Contexte Seconde partie de leur visite au studio, dans cette séquence, Julie Moulier et Adil Bouladi , acteur·ices dans Indestructible , évoquent leur projet, ce qui est déjà sur le feu, ce qui est en devenir… Manon Worms nous raconte, dans le sillage de cette création 2024 avec Hakim Bah (Cie Paupières Mobiles), ses travaux et ses rencontres. Elle relate sa découverte au Chili de l’activiste Pedro Lemebel (1952-2015) et comment elle décide de lui rendre hommage dans Cœurs fugitifs , la précédente création de la Cie Krasna. Dans la continuité, en 2025, Arcanes proposera une plongée dans l’univers de l’écrivaine et travailleuse du sexe Nelly Arcan (1973-2009), autrice de Putain (2001) et de Folle (2004), publiés aux éditions Seuil : « De Folle , texte en forme de lettre écrite suite à une relation destructrice avec un amant français, jaillissent des éclats aussi lumineux que tranchants, qui m’envahissent immédiatement. (…) Progressivement, je réalise que plonger dans Folle me permet surtout d’en émerger. Que lire Nelly Arcan rend vital le renouvellement des récits dans lesquels nous baignons et qui divisent le monde par injonctions de genre et de désirs. Oxygéner nos représentations devient un réflexe de survie. C’est par cette entrée physique, organique, instinctive, dans le texte, que je trouve la nécessité de faire du théâtre avec cette écriture. » Belle écoute ! À l’oreille Dalida – Le temps des fleurs Teaser du spectacle Indestructible aux Célestins (Lyon) Jolie Môme – L’hymne des femmes (2013) DJ Sharouh – Sarah Perez – Habibi Lawel – Habiba Msika (Sharouh Remix) Pedro Lemebel – Entrevista de Pagina12 (archive de 2011) Violeta Parra – La Carta DJ Sharouz – Sarah Perez – Desahogation, Acuario Barcelona, Sin À lire, à voir, à écouter Extraits lus de : L’au-delà en délire, avec et pour les sous-commun*es – Jack Halberstam, Préface de Les sous-communs – Planification fugitive et étude noire de Stefano Harney & Fred Moten Lien vers l’ouvrage Paolo Virno – Virtuosité et révolution, théorie politique de l’exode Lire en ligne Dr. Frank B Wilderson III – On The Civil Rights Movement Regarder la vidéo Sonic Agency, son et émergence de formes de résistance – Brandon LaBelle Lien vers le livre Sur la recommandation d’Adil Laboudi : Alice Zeniter – Deux moins un égale zéro (2003), L’Art de perdre (2017), Comme un empire dans un empire (2020) Entretien : « Je pense qu’en fait c’est ça l’écriture, c’est toujours du recyclage. » Regarder l’entretien Pour aller plus loin Cie Krasna Chants de lutte après la représentation d’Indestructible Au Théâtre de la Cité internationale le 31 janvier 2025. Télécharger le livret À écouter en lien sur Cause Commune Émissions Accords Aux Corps précédentes avec Julie Moulier Les portraits des TDS dans Lumière Rouge – vies d’insurgées…
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1 #15 – “Une guitare à la mer”, un programme de 3 courts métrages d’animation 1:25:54
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Avec Sophie Roze , réalisatrice de Une guitare à la mer , et avec Pierre-Luc Granjon , réalisateur de Les bottes de la nuit , deux des trois courts métrages d’animation qui composent le programme “Une guitare à la mer“, en salles depuis le 5 février (Little KMBO, à partir de 4 ans). Pierre-Luc Granjon a réalisé son film (12 min, noir et blanc) sur un écran d’épingles, une technique d’animation rare, inventée par Alexandre Alexeïeff et Claire Parker en 1976. Il en explique le fonctionnement. Sophie Roze a réalisé son film (30 min) en stop motion avec des marionnettes très expressive (une fouine, un capybara et un hérisson) pour une histoire d’amitié et de musique. Toustes deux sont interviewé.es par Yves Bouveret . Pour sa chronique “À fleur d’oreilles“ sur les sons du papier, Laura Cattabianchi a rencontré Agathe Bouchadon , designer graphique. Lionel Chenail a lu un extrait de “Les os des filles“, de Line Papin, Stock, 2019 ; Le livre de poche, 2020 Nouveauté discographique : “Deux poussins égalent trois“, de Poussins phoniques, CD, Bayard musique, février 2025…
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1 #235 – Au café libre – Les 10 ans d’Antanak – La guerre des IA 1:29:12
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S’abonner au podcast 235e émission Libre à vous ! de l’ April diffusée en direct mardi 11 février 2025 de 15 h 30 à 17 h 00 Au programme : sujet principal : Au café libre , débat autour de l’actualité du logiciel libre et des libertés informatiques chronique Que libérer d’autre que du logiciel sur les 10 ans d’Antanak chronique Le truc que (presque) personne n’a vraiment compris mais qui nous concerne toutes et tous de Benjamin Bellamy, intitulée « La guerre des IA » quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre Références Vous pouvez retrouvez toutes les références citées pendant l’émission (vous trouverez également sur cette page les podcasts par sujet traité ainsi qu’une transcription lorsqu’elle sera disponible). Intervenir en direct Vous pouvez nous rejoindre sur le salon de discussion de l’émission (salon #libreavous, mais nous n’y sommes pas forcément tout le temps) pour participer à notre discussion en direct, nous contacter ou nous laisser un commentaire. Licences Les podcasts et les photos, sauf indication contraires, sont diffusés selon les termes d’au moins une des licences suivantes : licence Art libre version 1.3 ou ultérieure, licence Creative Commons By Sa version 2.0 ou ultérieure et licence GNU FDL version 1.3 ou ultérieure. Les musiques sont diffusées sous leur propre licence, voir la page consacrée à chaque émission pour les licences précises.…
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1 #82 – Sylvie Gravagna et Nicolas Lambert, pour un théâtre d’éducation populaire (utile et joyeuse) 2:00:17
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Avec les deux fondateurs de la compagnie Un pas de côté on parle féminisme, anarchie, liberté, égalité, fraternité, colonisation et guerres de décolonisations, et des oublis ou omissions des manuels scolaires contemporains. Autant de thèmes qui traversent leurs pièces respectives. En dehors, la jeunesse de Rirette Maitrejean , que Sylvie joue au théâtre Le local des autrices, accompagnée sur scène par Juliette Flipo, nous raconte en l’incarnant la vie d’Anne-Henriette, jeune fille provinciale assoiffée de savoir et de liberté qui fuit vers la capitale pour échapper à un mariage forcé. A Paris elle travaille durement comme ouvrière et fréquente les universités populaires puis les causeries anarchistes. Elle adhère à leurs idées. Une vie libre ici et maintenant. Le refus de l’exploitation de l’homme par l’homme. L’égalité des sexes. Et ne décolère pas devant la répression sanglante des mouvements sociaux. Avec d’autres libertaires individualistes, elle diffuse ces idées, via un journal. Et ces jeunes gens idéalistes tentent de vivre quotidiennement, en communauté, leur idéal politique… Dans la France Empire , qu’il joue au théâtre de Belleville, Nicolas Lambert revient sur le passé colonial de la France en plongeant dans sa mémoire familiale. De son enfance picarde au démantèlement de l’Empire Républicain, il nous invite à feuilleter quelques pages manquantes de notre histoire nationale. Et la mise au jour de ces encombrants secrets de famille éclaire la manière dont aujourd’hui encore comprendre la manière dont, aujourd’hui encore, la France s’en va (ou pas) en guerre. Pour le meilleur ou pour l’Empire ? Deux salles deux époques, mais deux spectacles originaux créés par leurs auteur et autrice à partir de documents originaux et d’années de travail de recherche dont ils nous livrent les fruits, non dénaturés mais magnifiés par la puissance de la scène et de l’incarnation.…
Émission proposée en partenariat avec buycycle.com : buycycle la market place pour acheter ou vendre son vélo d’occasion, ou reconditionné. Cherchez, trouvez, buycycle s’occupe du reste. Le code promo est là . Emission que vous pourrez également retrouver sur Weelz! En plateau – Louis Mangeney Une sortie vélo sans une pause café, est-elle une sortie réussie ? Une fin de sortie vélo sans une bière pour se désaltérer, est-ce une sortie réussie ? Le café, le bar, l’estaminet, le troquet, le coffee shop font parti de la culture vélo. Et pourquoi pas le PMU ? Le PMU un lieu suranné ? Et si une pause au PMU n’était pas au contraire une façon de ne plus traverser un territoire mais de le vivre et l’essayer. Le ressentir et commencer à le comprendre ? Louis Mangeney a lancé une communauté le PWU_Tour . Et le PMU est soit une étape, soit une destination. Essayons avec Louis d’explorer la place du PMU dans notre imaginaire de cyclistes. Envie d’être le ou la prochaine invitée ? Le prochain à causer dans le micro. Contactez-moi, sur Linkedin , X, Instagram , ici via l’onglet contact de la radio aussi : contact@libre-a-toi.org. Vous pouvez aussi nous contacter simplement pour nous dire tout le mal ou le bien que vous pensez de Rayons Libres. Chronique Abel Guggenheim : Abel nous éclaire sur les éclairages. Il évoque le décret passé fin 2024 sur les éclairages à vélo. Une référence citée par Abel, ici, Nous voilà au pays de l’absurdistan . L’autre référence est ici . Musique : Fleetwood Mac -Dream Réalisation : Jérôme Sorrel…
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1 #81 – La Brav-M, manifestation de la violence d’État contre les citoyens avec Lucas Levy Lajeunesse. 1:29:56
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Lucas Lévy-Lajeunesse est professeur de philosophie et membre de la Ligue des droits de l’Homme. Il participe depuis 2019 aux activités de l’Observatoire parisien des libertés publiques, créé par la Ligue des droits de l’Homme et le Syndicat des avocats de France, pour documenter les pratiques policières à partir d’observations de terrain. Depuis plus de cinq ans, il couvre à ce titre des opérations de police, principalement à Paris. Nourri par ses observations, plusieurs années de recherches et de nombreux entretiens, le livre Police contre la démocratie, Politiques de la Brav-M , paru aux éditions Textuel, décortique la manière dont l’ordre policier va à l’encontre de l’état de droit notamment avec la création en 2019 de la Brav-M, brigade de répression de l’action violente motorisée, pour réprimer le mouvement des Gilets jaunes. Constituée de binômes de policiers à moto rappelant les « voltigeurs », symboles des pires pratiques de la police française, à l’origine de la mort de Malik Oussekine. L’existence même de cette brigade brutale et dirigée par des policiers s’étant illustrés par des actions violentes illustre la mise en place d’un système répressif fondamentalement antidémocratique.…
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1 #59 – UncovAI, détecter les contenus générés par l’IA avec Florian Barbaro 29:55
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Parlez-moi d’IA n°59, UncovAI , détecter les contenus générés par l’IA avec Florian Barbaro Comment repérer un texte écrit par une IA ? Depuis l’essor de ChatGPT et des autres IA génératives, une avalanche de contenus inonde le web. Articles, posts, vidéos… difficile de faire la différence entre un contenu authentique et un texte produit par une machine. Mais une startup française a décidé d’agir. UncovAI développe une technologie capable de détecter les contenus générés par IA avec une précision inédite et une méthode éco-responsable. Pour en parler, Florian Barbaro, son fondateur, est l’invité du podcast Parlez-moi d’IA. Au programme de cet épisode : Le parcours de Florian Barbaro et les origines d’ UncovAI L’essor des fake news et leur exploitation par certains acteurs Comment fonctionne concrètement la détection ? La certification des contenus C2PA et l’initiative Provenance du ministère de la Culture Les prochaines étapes : détection de l’audio et de la vidéo Un épisode passionnant pour comprendre les enjeux d’un web plus transparent, sourcé et fiable. Écoutez dès maintenant et partagez votre avis en commentaire ! Ressources citées dans l’émission Le site de UncovAI https://uncovai.com/ Le rapport de Viginum sur la campagne de désinformation prorusse Matriochka https://www.sgdsn.gouv.fr/publications/matriochka-une-campagne-prorusse-ciblant-les-medias-et-la-communaute-des-fact-checkers L’émission est également disponible chez les diffuseurs suivants : Youtube : https://youtu.be/UL2HeFvhTmw Spotify : https://open.spotify.com/show/3QaXD1il8s8fDUkoyAvTrH Deezer : https://deezer.com/show/1000288955 Appel Podcasts : https://podcasts.apple.com/fr/podcast/parlez-moi-dia/id1706654536 Pocket Casts : https://pca.st/9hjmbey7 PodcastAddict : https://podcastaddict.com/podcast/parlez-moi-d-ia-s-initier-et-comprendre-l-intelligence-artificielle/4676518 Transcriptions de Libre à lire ici : https://www.librealire.org/+-parlez-moi-d-ia-+ Aidez-nous à améliorer cette émission en répondant au questionnaire des auditeurs : https://linktw.in/RnCBIv Retrouvons-nous sur la chaîne whatApps de Parlez-moi d’IA pour partager des infos complémentaires et poser des questions. https://www.whatsapp.com/channel/0029VaJsvF7L2AU7dYaWLQ2Z…
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1 #11 – Nous aimerions vous entendre – Procès EHPAD Chateau de Neuville 1:52:53
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Comm’un vendredi — l’émission mensuelle qui vous présente les coulisses de Cause Commune. 11e émission en direct vendredi 7 février 2025 à 20 h. Pour l’émission du 7 février, nous aimerions vous entendre, auditrices ou auditeurs de la radio. Venez nous dire qui vous aimeriez entendre à la radio, pourquoi vous écoutez l’émission, vos conseils et vos ressentis en tant qu’auditrices et auditeurs. Venez au studio, à la soirée radio ouverte, à partir de 19 h 30, au 22 rue Bernard Dimey, 75018 Paris. Ou appelez au 09 72 51 55 46 pour intervenir à distance. L’émission sera également l’occasion de parler du procès « EHPAD Chateau de neuville poursuites judiciaires pour diffamation » , procès contre Siham Touazi infirmière dans cet EHPAD et Eugénie Barbezat, journaliste à L’humanité et animatrice de l’émission Liberté sur paroles sur la radio. Eugénie Barbezat reviendra sur ce procès. À l’oreille Les ogres de Solann Les anarchistes de Léo Ferré Balkan Beats par The Freak Fandango Orchestra, licence CC-BY SA 3.0…
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1 #66 – ‘Restitutions extraordinaires’ — détentions secrètes de la CIA 55:00
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Contexte : C’est quoi « Du poil sous les bras » ? C’est un entretien de Blan avec une personnalité qui grâce à son apport théorique ou pratique nous aide à comprendre les systèmes de domination et à agir pour plus d’égalité, d’équité et d’éthique. Et donc pour plus de justice sociale. À noter, les productions de Blan sont d’ores et déjà diffusées également sur une trentaine de radios en France, en Belgique, au Luxembourg et au (soi-disant) Québec ! L’émission #66, enregistrée en janvier 2025, avec Malika Danoy A propos de violation des droits fondamentaux… Enlèvements, détentions et tortures … Tout un programme de la CIA … Permettant l’émergence de ce qui peut être comparé à un vaste archipel pénitentiaire, entre 2001 et 2008 ce programme a organisé illégalement la détention et le transfert de milliers d’individus, aspirés dans un trou noir juridique, détenus pour un temps indéfini et soumis à la routine des tortures, des interrogatoires incessants et vains. Où l’on apprend que les américains ont mis en place dans les années 2000 un système répressif off-shore illégal, violent et très éloigné de toute idée de justice. Avec Malika Danoy , chercheuse en science politique, autrice de “ Enlever, détenir, torturer : l’archipel pénitentiaire de la « guerre contre la terreur” 2001-2010 (éditions Syllepse, collection Points cardinaux). Ses thématiques de recherche notamment à l’Université Paris 8, sont relatives aux théories et politiques de l’exception ; à la circulation des normes et des dispositifs répressifs étatiques ; et à la question de l’antiterrorisme et des droits fondamentaux. Musique : Joëlle Sambi & Sara Machine ︎ Not all men et Aurora, Pomme & Waxx ︎ Everything matters…
S’abonner au podcast S’abonner à la newsletter 19e émission Chemins de traverse diffusée en direct mercredi 5 février 2025 à 22 h Notre invité est le violoncelliste, chef d’orchestre et compositeur Raphaël Merlin qui nous parlera de son parcours artistique teinté d’éclectisme, de curiosité et d’engagement. Nous découvrirons également l’orchestre symphonique qu’il a créé Les Forces Majeures et le projet Accordez vos vélos ! , festival itinérant où les membres de l’orchestre se déplacent à vélo. Un festival auquel vous pourrez peut-être participer. Sommaire Liens À l’oreille Intervenir en direct Nous contacter Transcription Liens Raphaël Merlin Les Forces Majeures Accordez vos vélos ! Appel à participation pour mai 2025 (Paris) A découvrir émission Rayons libres sur Cause Commune Ana Meunier, cheffe d’orchestre (podcast et transcription) À l’oreille À Bicyclette – Yves Montand – orchestration: Raphaël Merlin Quartet ébène – Miles Davis – Milestones Schmaltz par Jahzzar (générique) Transcription Note concernant la transcription : nous avons choisi, comme le préconise l’article Pourquoi et comment rendre accessible un podcast ? , une transcription fidèle aux propos tenus, sans suppression des tics de langage (les phrases qui ne finissent pas (…), les répétitions, les onomatopées). Voix du générique (Laure-Élise Déniel) : Cause Commune, Chemins de traverse, d’autres voies pour imaginer demain . Fred : Bonsoir à toutes, bonsoir à tous pour ce 19ème épisode de Chemins de traverse, d’autres voies pour imaginer demain . Dans Chemins de traverse , Julie, Élise, Mehdi et moi-même Fred, nous espérons vous proposer de belles rencontres et mettre en avant des parcours personnels et professionnels, des passions, des engagements. Merci de nous accueillir dans votre salon, votre cuisine, voire votre chambre, ou peut-être encore pendant votre séance de sport. Notre invité ce mercredi est le violoncelliste, chef d’orchestre, compositeur Raphaël Merlin. Raphaël Merlin nous parlera de son parcours artistique teinté d’éclectisme, de curiosité et d’engagement. Nous découvrirons également l’orchestre qu’il a créé, les forces majeures, le projet Accordé, vos vélos, festival itinérant où les membres de l’orchestre se déplacent à vélo. Un festival auquel peut-être vous pourrez participer. Bonsoir Raphaël. Raphaël : Bonsoir. Fred : Alors avant que la discussion ne commence, je vous rappelle que nous sommes en direct ce mercredi 5 février 2025 sur Radio Cause Commune La Voix des Possibles, sur 93.1 FM et en DAB Plus en Ile-de-France, partout dans le monde sur le site causecommune.fm. N’hésitez pas à participer à intervenir en direct. Julie, qui réalise l’émission de ce soir, vous accueillera. Bonsoir Julie. Julie : Bonsoir à tous. Fred : Alors pour cela, notre téléphone est branché. Vous pouvez nous appeler au 09 72 51 55 46. Je répète, 09 72 51 55 46. Ou alors vous pouvez réagir sur le salon web de la radio. Rendez-vous sur le site causecommune.fm, bouton chat, salon, Chemins de traverse . Alors, rebonjour Raphaël. Comme chaque émission de Chemins de traverse , qui est beaucoup basée sur les parcours personnels et professionnels, on va commencer un petit peu par parler du parcours personnel et professionnel, avant d’en arriver à l’actualité qui va nous intéresser particulièrement. Et j’ai envie de vous poser la première question. Donc vous êtes violoncelliste, chef d’orchestre, compositeur. Mais de quand date la petite étincelle pour la musique ? À quel moment s’est-elle produite ? Raphaël : Je pense quand même qu’il y a eu plusieurs étincelles. J’ai eu beaucoup de chance parce que, dès le départ, avant même qu’il soit possible d’apprendre de jouer d’un instrument, j’étais entouré de musique dans ma famille, la famille nombreuse, des frères et sœurs qui étaient tous en filière horaires aménagés au conservatoire. Retour de l’école, il y avait toujours un peu de musique. Et puis, je me rappelle que mes sœurs jouaient souvent soit du piano, soit du violon avec mon père qui est violoniste amateur. Ma mère chantait. Il y a vraiment quelque chose de très naturel avec cette pratique de la musique, complètement pour le plaisir. Et on vivait à Clermont-Ferrand. C’est une ville dans laquelle le conservatoire était, je pense, d’une certaine manière très en avance. Parce qu’aujourd’hui, la plupart des conservatoires ont vocation à former des mélomanes ou des musiciens amateurs en priorité. La professionnalisation, ça représente une part infime. Et la musique, c’est un lieu de plaisir et c’est un lieu de partage avant tout. Donc, je me suis imprégné de musique avant de choisir de jouer du violoncelle. Et puis, après, il y a eu plein de petits rebondissements amusants dans une enfance. En vérité, j’étais inscrit d’abord en flûte à bec. Et puis, ma sœur m’a convaincu de changer. J’étais tout à fait d’accord. Je n’ai pas résisté. Moi, ça m’était complètement égal. Fred : C’était peu importe l’instrument. L’important, c’était la musique parce que vous baignez dedans en famille. Raphaël : Quand j’avais six ans, ce qui était important, c’était d’aller jouer au foot. Je faisais de la musique parce que mes frères et sœurs en faisaient, parce que c’était en quelque sorte non négociable. Et c’était très agréable en même temps, mais il n’y avait pas encore eu d’étincelle, comme vous dites. L’étincelle est arrivée plus tard. J’ai d’abord commencé à apprendre un peu comme ça le solfège, le violoncelle. Mais assez rapidement, j’ai eu envie de faire du piano. Et ça, c’était déjà assez puissant. Fred : Mais pourquoi vous avez choisi le violoncelle ? Raphaël : Parce que ma sœur est violoncelliste. En fait, il n’y avait pas de violoncelliste dans la famille. Il y avait deux violonistes, une altiste, un pianiste. Il y avait un clarinettiste, enfin un altiste devenu clarinettiste. Il y a eu un hautboïste. Mais il n’y avait pas de violoncelliste. Et donc, il manquait vraiment. C’était quand même un instrument un peu incontournable. Si on veut faire de la musique de chant, il faut quand même une basse. Fred : D’accord. Raphaël : Donc, c’est pour ça, je pense. Ma sœur m’a dit, fais du violoncelle. Parce qu’on était en vacances, il y avait le violoncelle d’un de mes cousins qui traînait par là. Fred : Et donc, vous êtes rentré à quel âge au conservatoire ? Raphaël : Six ans. Fred : Dès six ans, vous avez commencé à faire du violoncelle ? Raphaël : C’est ça. En CE1, six ans et demi, exactement. Et par contre, ça me plaisait sans plus. Mais par contre, j’ai très vite voulu faire du piano. J’ai réclamé à mes parents un prof de piano. Il n’y avait plus de place au conservatoire. J’ai eu une prof en particulier. Et puis, ce n’était pas extrêmement assidu ou intensif. Mais par contre, ce que moi je faisais au piano tout gamin c’était très inventif. J’adorais improviser déjà. Je cherchais pas mal. J’y passais du temps, en fait. C’était comme un jeu. Fred : Alors si je comprends bien le choix du piano, c’était pour le côté inventif et ludique par rapport au violoncelle. Parce que le violoncelle, c’est moins ludique, moins inventif ? Raphaël : Non, mais c’est difficile. Les instruments à cordes, c’est vraiment difficile, surtout quand on débute. Et avant de pouvoir vraiment jouer avec, il faut avoir pas mal pris le contrôle de l’instrument. Ça prend quelques années pour faire un son joli, pour sentir le contrôle du son. Ça peut être long, vraiment. C’est très difficile, en réalité. Fred : Vous savez ce que ça me rappelle ? Ce que m’a dit un jour le voisin. Je vais préciser parce que mon fils est juste à côté de moi, donc il fait du hautbois aujourd’hui, il a 19 ans. Quand il démarrait, il était très jeune, pareil. Notre voisin, le mur était un peu en carton. Le voisin entendait, donc on s’excusait un petit peu. Le voisin nous a dit « ne vous inquiétez pas. Aujourd’hui, c’est du bruit. Bientôt, ce sera de la musique ». C’est un instrument, le hautbois, qui est un peu ingrat, parce qu’il faut beaucoup travailler avant de faire quelque chose. Donc le violoncelle, c’est un petit peu pareil. Si je comprends bien, moi qui ne connais pas grand-chose à la musique, le piano permet une inventivité, permet de faire des choses amusantes beaucoup plus rapidement. Raphaël : Tout à fait, parce que le piano, c’est un instrument pré-fabriqué. Toutes les notes sont déjà fabriquées avant, quand vous appuyez sur la touche. Fred : Ah oui, la note sort. Raphaël : Oui, les cordes sont tendues, elles sont accordées, le marteau est bien en place. Vous n’avez plus qu’à presser sur un bouton pour produire le son. Alors évidemment, après, on ne va pas réduire le piano à ça. Mais c’est quand même une action qui est toujours la même action, quelle que soit la note que vous jouez. Et vous allez moduler la même action. Alors que quand vous jouez du violon, à la base, l’archet, vous pouvez l’actionner dans deux sens. On tire l’archet et on pousse l’archet. Et puis les doigts que vous posez sur la touche qui vont déterminer les notes que vous jouez, vous pouvez les poser absolument n’importe où sur cette touche. Donc la hauteur du son peut tomber n’importe où. C’est pour ça qu’on peut si facilement jouer faux ou en tout cas ne pas jouer la hauteur qu’on voudrait produire au violon. Et ainsi de suite. Pour mille raisons, le violon est un instrument de funambule. C’est-à-dire, vous êtes sur un fil. Et pour obtenir le signal aussi précis que possible, il faut parfois des années d’exercices. C’est un drôle de truc en vrai. Mais c’est aussi une source de satisfaction inégalable, je pense. Fred : D’accord. Alors je suppose que vous, vous êtes dans une famille de musiciennes et de musiciens. Vous avez baigné dans les concerts assez rapidement. Raphaël : Oui. Fred : Notamment les concerts classiques. Raphaël : Oui, c’est ça. Mes parents nous emmenaient souvent écouter des concerts. Pas seulement classiques, mais oui. Fred : D’accord. Raphaël : Tout à fait. Au début, quand on est gosse, on y va, on s’endort. Fred : Alors c’est ma question. Pas si vous vous endormez, mais quand vous reveniez chez vous, est-ce que vous essayiez de refaire les notes que vous aviez entendues ? Raphaël : Ah, bonne question. Pas exactement. Non, je ne dirais pas ça. Mais par contre, les cours de solfège ont été très importants. J’ai eu, sur l’ensemble, de la chance. Je pense que j’ai eu de très bonnes professeures de solfège. Et je me rappelle très bien que là, il y a eu des étincelles. Fred : D’accord, en solfège ? Raphaël : Ah oui. Parce que c’est en solfège que j’ai, pour la première fois, senti un certain langage harmonique s’emparer de moi. J’ai découvert Haydn, j’ai découvert Schumann, j’ai découvert Beethoven, tout ça en cours de solfège. Et à chaque fois, c’est quelque chose de différent. C’est une œuvre très marquante. Et il y a une anecdote, c’est qu’en cours de solfège, on a chanté, je ne sais plus où je devais avoir 10 ans, le mouvement lent de la septième symphonie de Beethoven. Donc, c’était un genre de tube très connu. Et c’est assez rudimentaire comme musique. Et en rentrant à la maison, d’oreille et de mémoire, je l’ai joué au piano. Et c’était déjà un peu plus tard. Je pense que j’avais 11 ou 12 ans, je ne sais pas exactement. Et ma mère est entrée dans le salon à ce moment-là. Elle a dit, ah ben voilà, c’est ça que tu dois faire. Tu dois être chef d’orchestre puisque tu entends tout. Pour elle, c’était notable que j’avais fait ce décodage dans ma mémoire. J’avais retrouvé ce que j’avais entendu en cours de solfège. Je me suis rendu capable de le rejouer de mémoire sur le piano en ayant identifié les harmonies. Et quand on peut identifier des harmonies, on sait quelles couleurs elles ont. On sait comment elles sont construites. Donc, on peut les transposer aussi. Ça, c’est de la mécanique intellectuelle qui peut paraître très compliquée quand on ne sait pas. Fred : Quand on ne s’y connaît pas. Raphaël : En fait, c’est extrêmement logique. C’est même relativement réduit. Il n’y a pas tant d’éléments que ça à connaître. Mais il faut reconnaître la quinte par rapport à la quarte. Ça, c’est essentiel. C’est ce qu’on appelle des intervalles. Fred : Est-ce que ça a un aspect mathématique ? Raphaël : Oui, tout à fait. Ce qui définit les notes de la gamme en musique, c’est le résultat de la division par des nombres entiers d’une longueur vibrante. Fred : D’accord. Raphaël : Alors après, on rentre là-dedans. Fred : Non, on ne va pas rentrer là-dedans parce qu’on n’est pas sur France Culture, comme on a dit avant l’émission. On ne va pas rentrer dans la technique musicale. On va parler de la passion. Mais c’est quand même très intéressant. Donc, à 10, 11 ans, votre maman a identifié que peut-être vous pourriez devenir chef d’orchestre ? Raphaël : À ce stage-là, j’avais déjà un peu ressenti le coup de foudre pour le violoncelle et pour tout un tas de pratiques de musique. Je suis tombé amoureux successivement du piano, ensuite du violoncelle. D’abord, le piano pour le côté ludique dont je parlais tout à l’heure, où on peut jouer, reconnaître, accompagner aussi des chansons, des choses relativement simples. Après, le violoncelle, c’était l’élan romantique. J’arrivais à la puberté, la pré-adolescence. Ça, ça a vraiment été très puissant. Ensuite, je suis tombé amoureux du jazz. Et puis ensuite, je suis tombé amoureux de la direction d’orchestre. Quand je dis tombé amoureux, c’est bête comme expression, mais c’est quand même… Là, c’est vous qui l’avez dit, l’étincelle. À chaque fois, c’est une étincelle, c’est-à-dire que vous ressentez… Et je peux exactement vous dire pourquoi. La première fois que j’ai ressenti cette chose-là avec le jazz, c’était un disque de Billy Evans Trio qui s’appelle Time Remembered. Et c’était le premier morceau qui s’appelle Who Cares, un double disque vinyle que mon frère avait reçu à Noël. J’ai entendu ça. Il y a eu un avant et un après. D’un coup, le rapport à la pulsation et au langage harmonique extraordinaire, d’ailleurs, de Billy Evans. Ça, ça m’a complètement marqué. Fred : C’était vers quel âge, ça ? Vous vous souvenez ? Raphaël : Je pense que j’avais 12 ans. Fred : Ah oui, donc vous étiez jeune, d’accord. Raphaël : Ouais, 12 ou 13 ans, je pense. Et puis, la première fois que j’ai vraiment senti que le violoncelle était un tel médium d’intensité lyrique et de force de bravoure, presque un instrument un peu héroïque et très, très intense, c’était quand je travaillais le Concerto de Saint-Saëns du haut de mes 11 ans avec un prof russe que j’ai rencontré à ce moment-là. Bref, ce sont des déclics, en fait, successifs. Fred : Alors, est-ce que les profs ont joué un rôle aussi dans ces déclics, ces étincelles ? Raphaël : Oui, bien sûr, tous, chacun d’entre eux. Je vous parlais de mes profs de solfège, mes profs de violoncelle. Je peux tous les citer. Ils sont très nombreux. C’est vraiment la pédagogie. C’est vraiment ce que fait un semeur. Vous semez, semez, semez à des tas et des tas d’élèves. Vous donnez ce que vous pouvez. Et puis, vous ne savez pas du tout où est-ce que ça va germer, où est-ce que ça va rencontrer les oreilles ou la personnalité d’un élève ou d’une étudiante ou d’un étudiant. Et parfois, 20 ans plus tard, vous vous rendez compte que parmi vos étudiants, l’une ou l’un d’entre eux est devenu exactement ce que vous n’auriez jamais pensé qu’elles deviennent ou qu’ils deviennent. C’est très étonnant, ce truc-là. Si on aime ce qu’on enseigne, il n’y a pas de problème. On peut tout à fait bien le vivre de ne pas avoir de retour sur investissement ou en tout cas de ne pas savoir. Mais si on enseigne à une discipline qu’on n’aime pas spécialement, c’est un métier très difficile. Fred : Oui, j’imagine bien, oui. Raphaël : Et je crois que j’ai eu beaucoup de chance aussi de ce point de vue-là. J’ai rencontré des pédagogues très patients, très ouverts d’esprit. Fred : Ça me fait penser, juste une petite parenthèse. On a reçu il y a quelques semaines dans l’émission, c’était Julie qui animait, Michelle Tellier, qui est flûtiste à bec et qui est aussi visiblement une enseignante qui a beaucoup compté pour Julie. Donc je vous encourage à écouter le podcast ou lire la transcription sur Chemins de traverse . Donc sur causecommune.fm, dans l’affiche Chemins de traverse , c’est Michelle Tellier. Le titre, c’était Une Américaine à Paris . Donc là, on revient. On sent une passion, une étincelle, peut-être les papillons dans le ventre, comme on dit. Parce que quand on parle d’amour, souvent, il y a des papillons dans le ventre. Et les études, comment ça se passait ? Les études, on va dire classiques, entre guillemets. Raphaël : Les études classiques, j’étais donc dans cette filière horaires aménagés jusqu’en troisième. Il y avait quatre demi-journées par semaine, pas entièrement, mais un bon contingent horaire dédié à la musique. Il y avait le cours d’instruments, la séance de chorale, les deux cours de solfège, tout ça intégré à l’emploi du temps. Donc j’avais un enseignement tout à fait général, tout à fait complet. Mais avec cet aménagement d’horaire qui, malheureusement, disparaît des filières progressivement. C’est quelque chose qu’on a tendance à mettre sous le tapis, voire à éteindre, parce que ce serait une sorte de niche discriminante, c’est-à-dire que ce serait une filière privilégiée. Et je pense qu’on peut le voir exactement à l’inverse. Je pense que dans la mesure où c’était accessible à n’importe quel enfant qui pouvait s’intéresser à la musique et à qui on pouvait donner du temps et un instrument. Bien sûr, ça représente de l’argent et une certaine aisance financière, mais il y avait des facilités. Et je me rappelle très bien que dans cette classe horaires aménagés musique, il y avait des tas de camarades de classe qui étaient ni de grandes familles bourgeoises ou aristos, bien au contraire, et qui avaient accès à cet art qui est souvent assimilé à une classe sociale. C’est un vrai lieu de réflexion et de combat, parce qu’on en souffre tous plus ou moins. La musique classique, il se trouve qu’elle a existé jusqu’au 20e siècle parce qu’elle était financée par les très hautes couches sociales. La plupart du temps, si vous regardez les grands compositeurs du 17, 18, 19e siècle, ils étaient l’équivalent à l’époque de ce qu’aujourd’hui, on pourrait appeler quelqu’un de sponsorisé, de mécéné, effectivement entretenus. Haydn, par exemple, sans le comte Esterházy, on ne sait pas s’il aurait pu écrire un dixième de ce qu’il a écrit comme symphonie, comme sonate, etc. Mozart avait besoin d’être soutenu par les fameuses histoires de l’archevêque de Salzbourg ou de l’empereur de Vienne. Ils ont tous plus ou moins été soutenus par l’aristocratie. Et au 20e siècle, ce phénomène-là s’est estompé à l’après-guerre. Il y a vraiment eu, en tout cas en France, mais pas seulement, ce phénomène de démocratisation qui reposait vraiment sur la grande maxime de l’élitisme pour tous. Parce qu’il faut le reconnaître, la musique classique est une musique, globalement, on peut tout à fait trouver plein de contre-exemples, mais globalement, qui est plus complexe que les autres musiques, c’est-à-dire qu’elle comprend plus de signifiants et de codes. Il y a souvent besoin d’un chemin d’apprentissage ou d’apprivoisement plus long pour pouvoir saisir la substance de cette musique. Alors après, il y a plein de contre-exemples, je le redis. C’est un petit peu comme une langue qu’on ne pourrait pas parler avant d’avoir appris trois ou quatre alphabets. Alors qu’il y a d’autres langues qu’on peut apprendre plus facilement, qui correspondraient peut-être à d’autres musiques, des musiques plus orales, moins codifiées, avec des schémas harmoniques moins riches ou moins complexes. Ça, c’est un sujet passionnant et interminable, mais qui n’a absolument rien à voir avec d’où on vient dans la société et combien d’argent gagnent les papas et mamans et est-ce qu’on peut l’étudier. Fred : J’ai quand même une question là-dessus sur l’argent. Parce qu’il y a quand même des instruments qui coûtent plus ou moins cher. Et dans la musique classique, il y a des instruments qui coûtent plusieurs milliers d’euros. Donc est-ce que dans les orchestres, par exemple, je vous l’ai posé la question tout à l’heure, mais je vais la poser maintenant, est-ce qu’il y a une sorte de sociologie en fonction des instruments par rapport à l’origine des personnes qui en jouent ? Raphaël : C’est assez juste. Oui, globalement, l’instrument en moyenne le plus cher de l’orchestre, c’est plutôt la famille des violons. Et je sais qu’il y a des études sociologiques qui ont été faites là-dessus qui montrent que dans les cuivres, en général, déjà la parité est plus difficile à atteindre dans les cuivres et les percussions. Souvent, il y a plus de garçons et moins de filles dans ces pupitres-là. À l’inverse, la harpe ou assez souvent la flûte et les instruments à cordes, on trouve plus facilement des filles et c’est plus rare de trouver des garçons. Mais ça, ça change, je pense. Aujourd’hui, c’est vraiment des clichés qui disparaissent progressivement, qui s’estompent. Cela dit, ces études-là ne sont pas si anciennes. C’est vrai qu’encore aujourd’hui, il y a des corrélations. Mais ce n’est pas seulement le prix de l’instrument. Ce n’est même probablement pas le premier facteur. En fait, c’est très culturel, tout simplement. Par exemple, la région du Nord de la France est très coutumière de fanfare, donc de musique de rue, de musique de plein air. Donc, les instruments à vent, et notamment les cuivres, sont bien plus facilement apprivoisés, entendus, relayés. Fred : C’est culturel. Raphaël : Voilà, c’est culturel. Ça, c’est l’histoire de telle ou telle région, telle ou telle musique. Tout existe. En Allemagne, qui est le pays le plus intensément nourri de culture de la musique instrumentale et classique, vous avez des exemples incroyables. Des villages de même pas trois mille habitants, où vous avez quand même une saison de musique de chambre, c’est-à-dire dix concerts qui sont programmés, payants, pleins à craquer, où les gens se précipitent pour aller entendre des choses qui, peut-être en France, pourraient sembler un peu abscondes ou irréelles. Tous les gosses apprennent assez sérieusement à chanter dans des chorales à l’école, alors qu’en France, c’est une option, voire quelque chose dont on se débarrasse, etc. Non, la France, c’est un pays de littérature, en premier lieu. C’est un grand pays de littérature, c’est un pays de musique aussi, bien sûr. On a une très belle culture et une très belle histoire musicale dans la culture française, mais beaucoup moins globalement pleine. Si vous prenez les dix compositeurs de musique, dites classiques, attention avec ce terme, mais disons de musique, grosso modo classique, instrumentale de l’histoire de la musique, qui ont vendu le plus de disques, si vous voulez. Si vous prenez Bach, Schubert, Mendelssohn, Beethoven, vous avez fait vite fait le tour. Vous avez sur les dix, probablement au moins huit de culture germanique. Fred : D’accord. Raphaël : Oui, c’est difficile de rivaliser avec Schubert au niveau de l’applaudimètre et le palmarès, bien sûr. Et puis d’ailleurs, ça se voit au cinéma, ça. Le cinéma est un art majoritairement porté à l’échelle planétaire par l’industrie américaine. Eh bien, qui sont les compositeurs qui ont le plus de retentissement ? Chez Kubrick, par exemple. Fred : Oui, Kubrick a beaucoup utilisé. Raphaël : Schubert, Beethoven, Ligeti, Bartók aussi, bien sûr. Mais oui. Fred : D’accord. On va revenir un peu sur votre parcours. À quel moment, finalement, vous vous êtes dit ou vous êtes devenu professionnel de la musique ? Parce que vous aviez les deux, donc en horaires aménagés. Donc, vous suiviez la filière classique, en tout cas, la filière d’études générales. La musique à côté. À quel moment vous vous êtes dit ce que je veux faire, c’est de la musique à titre professionnel. Je veux être violoncelliste ou pianiste. Raphaël : Vers le virage de la sortie de collège. En arrivant en troisième, il fallait commencer un petit peu à s’orienter. Et comme le conservatoire me passionnait, toutes ces musiques-là me passionnaient. À cet âge-là, j’avais le violoncelle, je faisais du piano jazz assez régulièrement. Et je commençais un peu à écrire et à avoir envie d’explorer d’autres choses. C’était vraiment devenu mon activité principale. Alors que jusqu’à la fin de la cinquième, j’avais mon club de foot. J’adorais ça. J’étais meneur de jeu, capitaine. Vraiment, j’adorais mon équipe de foot. C’était un vrai crève-cœur de devoir arrêter le foot parce que l’entraînement du mercredi après-midi tombait sur les répètes d’orchestre au conservatoire. Et qu’il a fallu choisir entre mes deux passions. Fred : Alors, le piano jazz, est-ce que le jazz, c’est pour le côté improvisation qui vous attirait ? Ou la liberté que permet le jazz ? Ou peut-être il y a moins de liberté, telle que j’imagine dans la musique classique, où il faut quand même suivre la partition et puis ce que demande le chef d’orchestre ou la cheffe d’orchestre ? Raphaël : Oui, tout à fait. C’est certainement pour ça. Mais pas seulement. Dans le jazz, vous avez un système d’organisation du temps et du son. En fait, la musique, grosso modo, on peut dire qu’elle se divise, elle s’articule sur ces deux éléments. Le premier élément, c’est le temps. Le deuxième élément, c’est le son. Le reste rentre forcément dans une de ces deux catégories. Et en jazz, la division du temps, elle est fondée à la fois sur une régularité assez implacable, contrairement au classique, qui est beaucoup plus aléatoire. La pulsation dans une oeuvre classique, souvent, est sujette à pas mal d’altérations, de modifications. Ce qu’on appelle le rubato. Alors qu’en jazz, souvent, la présence d’un batteur, le swing, et puis les différents types de pulsations, souvent quand même en jazz, on n’accélère pas, on ne ralentit pas. Ce n’est vraiment pas quelque chose de très usuel. Par contre, la division de la pulsation est en jazz beaucoup moins arithmétique qu’en classique. C’est-à-dire que le concept de division d’une noire en deux croches, en jazz, vous avez une infinité de manières de diviser votre noire en deux croches. Tous les batteurs ont leur manière de faire un shabada différent. Donc le swing n’a pas du tout la même teneur, c’est très, très, très personnalisé. Ça, c’est une chose pour le temps. Et côté son, c’est-à-dire hauteur sonore, l’échelle des harmonies en jazz, effectivement, comme vous dites, elle est sujette à un très grand choix. On choisit, quand on est instrument polyphonique, c’est-à-dire quand on joue soit du piano, soit de la guitare, tous ces instruments qui permettent de jouer plusieurs notes à la fois, donc de produire des accords, des harmonies. C’est un petit peu l’équivalent, je ne sais pas moi, il y a quelque chose de l’ordre de la comptabilité. Vous êtes responsable du langage harmonique. C’est comme si vous deviez approvisionner pour un chef cuisinier, être sûr qu’il y a tous les ingrédients. Il faut arriver avec tous les intervalles à disposition et en jazz, on est très libre de ça. On peut choisir les recettes harmoniques, on peut les modifier beaucoup. Donc là, effectivement, il y a beaucoup de liberté. Mais quand vous parlez d’improvisation, spontanément, moi, ça me fait penser à ces très grands improvisateurs de jazz, instrumentistes, solistes, trompettistes, pianistes, violonistes aussi d’ailleurs, qui sont effectivement parfois portés par une espèce de force surnaturelle, l’inspiration d’où ça vient, comment ça fonctionne. Bon, en fait, ça ne vient quand même jamais de nulle part. C’est le résultat d’un travail et d’avoir observé et respecté le cadre dans lequel on doit improviser. Fred : D’accord. Alors, vous arrivez donc à la fin de vos études, le choix professionnel, c’est donc quoi ? Parce que ce que si j’ai bien compris, vous êtes avant tout violoniste, pianiste après. Raphaël : Après, oui. Fred : Donc vous commencez comment ? Dans des orchestres ? Raphaël : Je quitte ma ville natale. Fred : Ah, vous quittez Clermont-Ferrand, pour aller où ? Raphaël : À Paris. Pour poursuivre mes études, quand j’ai 14 ans, j’entre en seconde au CNED, les cours par correspondance, pour pouvoir être toute la journée au conservatoire et avancer là-dessus. Donc ça, c’était un choix très fort que je n’ai pas supporté. Pas assez de vie sociale, c’était trop tout seul à la maison et au conservatoire. J’ai fait un an et après l’entrée en première, j’ai été admis en région parisienne au lycée Racine dans le 8e et au conservatoire de Boulogne-Biancourt avec un professeur de violoncelle qui est très reconnu, Xavier Gagnepain, avec qui j’ai pu vraiment trouver une substance pédagogique de très très haut vol. Et autour aussi en musique de chambre et en direction d’orchestre. Après, j’ai rencontré différents professeurs. Là, je savais déjà que je voulais en faire mon métier. Fred : D’accord. Raphaël : Quand on décide de quitter le nid familial, c’est dur à 15 ans de quitter ses parents. Fred : Oui, c’est difficile. Raphaël : J’ai été très bien accueilli, j’ai eu beaucoup de chance. J’ai vécu deux ans chez une tante ici qui s’est super bien occupée de moi. Je n’étais pas du tout à la rue, je n’étais pas du tout non plus livré à moi-même. Mais j’ai quand même quitté la maison de mon enfance dans laquelle j’étais très heureux. Et ça, pour me suivre mon petit chemin de professionnalisation et toutes ces rencontres, c’était absolument galvanisant comme phase de vie. Mais il y avait une part de risque quand même. Et après, formellement, quand est-ce que je deviens pro vraiment ? Quand est-ce que je commence à gagner ma vie avec la musique ? C’est quelques années plus tard, en cours d’études. J’étais au conservatoire de Paris au CNSM en violoncelle. J’ai été intégré à un quatuor à cordes. Et ce quatuor, le quatuor Ebène, qui a été mon lieu de travail principal pendant plus de 20 ans. Assez rapidement, on a gagné des concours et à la suite de ces concours, on a eu des engagements. On a fait de la scène, des concerts, des concerts payés. Fred : Peut-être expliquer ce que c’est qu’un quatuor et quelles sont les quatre personnes et instruments qu’on trouve au quatuor Ébène, dont on va entendre tout à l’heure un extrait. Raphaël : Alors le quatuor à cordes, c’est une formation d’instruments composé de deux violons, un alto et un violoncelle. En réalité, on peut dire que c’est quatre fois le même instrument, puisque l’alto n’est jamais qu’un gros violon, le violoncelle n’est jamais qu’un gros violon. Ça n’est qu’une affaire de taille. C’est quatre fois rigoureusement le même système, des cordes tendues sur une caisse de résonance en bois, frottées, mises en résonance par un archet. Et cet instrument, il a une énorme part de l’histoire de la musique occidentale, dont il est complètement interdépendant. Alors le violon n’est pas seulement un instrument occidental, on le trouve dans beaucoup d’autres cultures, mais c’est quand même un peu l’instrument roi parmi des instruments monodiques, c’est-à-dire qu’il ne joue qu’une note à la fois, parce qu’on le retrouve dans toutes les grandes symphonies de toutes les époques. Et le quatuor à cordes, c’est en musique de chambre. Alors la musique de chambre, ça concerne les petits groupes de musiciens, c’est là qu’en général, on n’a pas de chef d’orchestre, on se débrouille un peu entre nous. Et le quatuor, c’est la formation la plus répandue dans la musique de chambre, ou en tout cas, c’est celle qui a suscité le plus de compositeurs. Fred : Ah oui ? Raphaël : Oui, c’est-à-dire que Beethoven, qui est considéré comme le ou l’un des plus grands compositeurs romantiques ou classiques, selon à quelle époque de sa vie, il a écrit 16 quatuors à cordes qui sont considérés comme un sommet absolu. Bartók a écrit 6 quatuors à cordes, c’est aussi le sommet de sa production de musique de chambre. Haydn en a carrément écrit 75, Mozart en a écrit beaucoup, c’est d’ailleurs célèbre, il a beaucoup souffert en écrivant des quatuors, ça a été très dur pour lui. Le quatuor, si vous voulez, c’est un peu un cadre idéal. C’est quelque chose dans lequel l’idée de musique trouve une sorte de tapis capable de tout encaisser. On peut tout écrire pour un quatuor. Mais par contre, pour bien écrire pour quatuor, il faut une grande connaissance de la science de l’écriture, de ce qu’on appelle l’harmonie, le contrepoint, la composition, et puis aussi une grande connaissance organologique, c’est-à-dire de comment ces instruments-là doivent être traités. Pardon, je ne réponds pas exactement à votre question, mais moi, en 2002, quand j’ai rejoint dans le quatuor Ébène, j’étais à cette époque-là particulièrement touche à touche, je faisais plein de trucs à la fois, du violoncelle, de la direction d’orchestre, du jazz, de la composition, et j’ai mis tous mes œufs dans le même panier, c’est-à-dire qu’à ce moment-là, j’ai senti que je rejoignais trois musiciens très déterminés, très sérieux, très ambitieux, et qu’en travaillant avec ces trois-là, ma vie allait prendre un autre tour, et que j’allais avoir accès à une bien plus puissante et profonde expérience musicale. Fred : Et ça a duré 20 ans, et en préparant l’émission, j’ai regardé la page Wikipédia, et selon Wikipédia « le quatuor ébène se distingue par sa maîtrise, lui donnant la liberté de se consacrer avec la même ferveur à la musique classique, à la musique contemporaine et au jazz, dont il se plaît à abolir les frontières musicales. Le quatuor est reconnu mondialement ». En plus, vous avez visité le monde entier grâce à ce quatuor Ébène. Raphaël : Le quatuor Ébène, c’est effectivement une très belle réussite en termes de carrière. On a donc gagné ce concours à Munich en 2004, qui a vraiment d’un coup ouvert les portes du circuit professionnel. Effectivement, assez rapidement, ça se mondialise, parce que c’est un marché tout petit. Il n’y a quand même pas beaucoup de publics qui sont prêts à se précipiter pour aller écouter un quatuor à cordes. Fred : Vous faisiez combien de concerts par an ? Raphaël : 100 ! Fred : Ah oui, 100 concerts quand même ! Raphaël : Donc on était quasiment tout le temps en tournée. On travaillait beaucoup, c’était très intense. Et il continue, mes chers ex-collègues poursuivent cette carrière brillante. Et donc, tous les ans, il y a une tournée aux Etats-Unis, une tournée tous les deux ans au Japon. On avait joué plusieurs fois au Brésil. Et puis, pour moi, le point culminant de cette carrière, ça a été le tour du monde en 2019, avec l’intégrale des quators de Beethoven, justement, qu’on a enregistré en 7 CD qui sont dans un coffret. Et chacun de ces CD a été enregistré sur un continent différent. Le pitch de cette aventure était comment mettre à l’épreuve l’universalisme et l’universalité de la musique de Beethoven, aujourd’hui en allant se frotter à des Kenyans, à des Maoris, à des Brésiliens, dans des favelas, dans un bidonville à Korogocho, en banlieue de Nairobi. Et en même temps, au public de la Haute, c’est-à-dire le public de la Philharmonie de Paris, du Konzerthaus de Vienne ou du Philadelphia. Fred : D’accord. Alors, désolé, j’ai été perturbé parce qu’il y a eu un message nous disant qu’il y a un petit problème de diffusion sur le DAB+, donc j’espère que quand même tout va bien sur la FM. Vous dites que vos camarades continuent. Alors, est-ce que je peux vous demander pourquoi vous avez arrêté ? Parce que j’ai lu que c’était peut-être lié à un accident ou est-ce que c’est un changement de carrière ? Raphaël : C’est un changement de carrière. L’accident est arrivé après. C’est-à-dire qu’il s’est trouvé que j’ai travaillé avec un orchestre en Suisse en 2022, à la suite de cette grande tournée à vélo avec mon orchestre Les Forces Majeures . On est arrivé à Genève en avril 2022 pour un grand concert de clôture de tournée et j’ai dirigé cette représentation avec l’Orchestre de Chambre de Genève, qui à l’époque était en recherche d’un directeur musical. J’ai postulé là-bas et ils m’ont choisi. Et là, ce n’était pas compatible avec ma place de quartetiste. C’est-à-dire qu’il fallait que je… Fred : En termes d’emploi du temps ? Raphaël : Voilà, tout simplement. Et donc, à ce moment-là, le choix a été évident. Il fallait choisir l’un ou l’autre. Et je savais en moi-même que je n’avais plus l’énergie pour m’engager 20 ans de plus dans ce quatuor. Or, l’engagement dans un quatuor à cordes à plein temps, c’est quelque chose qui est très spécial, qui demande beaucoup de don de soi et de se mettre à nu, c’est-à-dire de se… On partage en fait un peu comme une famille. C’est une vie très rapprochée. C’est pour ça que c’est très difficile à concilier avec une vie de famille d’ailleurs. Fred : Ça va être ma question. Comment vous conciliez ça avec la vie de famille ? Raphaël : Chacun sa manière. Vous trouvez… Tout existe. La pratique du quatuor à cordes, ça a fait couler beaucoup d’encre. Il y a beaucoup de littérature là-dessus, beaucoup de livres qui décrivent comment le quatuor Amadeus, comment le quatuor Alban-Berg et comment d’ailleurs aussi le quatuor Ébène a traversé ces années. Puisque quand je vous dis 100 concerts par an, ça veut dire 200 jours par an de voyage. Et ça veut dire que quand vous partez trois semaines aux États-Unis en tournée, si vous avez des enfants, vous leur dites « Papa revient dans trois semaines ». Moi, j’ai raté la naissance de mon premier fils parce que j’étais en Californie. C’est des choses très difficiles à vivre. Je ne veux pas faire étalage de ça, mais si vous voulez, on doit accepter qu’on a quand même donné notre activité professionnelle à une passion qui a quelque chose de dévorant, voire de rouleau compresseur. Mais d’un autre côté, c’est le prix à payer pour faire les choses au plus haut niveau. On n’est pas les premiers à l’avoir fait. Et on vit à une époque où quand même les facilités sont énormes. On peut tous les jours voir ses enfants en visio et on peut rentrer chez soi bien plus rapidement. À l’époque du Quator Amadeus, dans les années 60, quand ils partaient en tournée aux États-Unis, eux, c’était pour six mois. Ce n’était pas pour trois semaines. Donc, bon, les choses changent. Fred : D’accord. On va faire une petite pause musicale et on va en profiter d’ailleurs pour écouter un extrait du Quator Ébène. C’est Miles Davis, « Milestones ». Ça dure deux minutes trente. On se retrouve donc dans deux minutes trente. Belle soirée, l’écoute de Cause Commune , La voix des possibles . [ Diffusion de la pause musicale ] Voix du jingle (Laure-Élise Déniel) : Cause Commune, 93.1. Nous venons d’écouter le Quator Ébène, Miles Davis, « Milestones ». Vous êtes toujours sur Cause Commune , l’émission Chemins de traverse . Je suis toujours avec Raphaël Merlin, violoncelliste, chef d’orchestre et compositeur. N’hésitez pas à participer à notre conversation 09 72 51 55 46. Je répète, 09 72 51 55 46. Ou sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton chat, salon Chemins de traverse . Alors, juste avant la pause musicale, on avait un peu parlé du parcours professionnel de Raphaël Merlin, mais on n’a pas fini d’en parler parce qu’après, on va parler des projets actuels. Mais en préparant l’émission, c’est assez marrant parce qu’il y a quelques jours, on était à la maison avec une voisine qui demandait à Lilian « à quoi ça sert un chef d’orchestre ? » Et je me suis dit, c’est vrai qu’il y a eu une discussion, donc Lilian a fait des réponses. Je me suis dit, on a un chef d’orchestre et c’est vrai qu’on se demande finalement la question, c’est pourquoi un orchestre a besoin d’être dirigé alors que vous venez de dire tout à l’heure que le Quator Ébène, enfin les quators, finalement, ils n’avaient pas besoin d’un chef d’orchestre. Donc, j’ai envie de vous demander à quoi sert un chef d’orchestre déjà ? Raphaël : Alors, effectivement, un quator à cordes, c’est un exemple de répartition des tâches, des responsabilités entre quatre personnes. Si vous voulez, il n’y a rien qui empêche de diriger un quator à cordes. Moi, ça m’est arrivé récemment, j’ai eu l’occasion de diriger un quator tout simplement parce que, et ça, je pense que c’est la première réponse à la question que vous posez, tout simplement parce que le quator en question, ces quatre personnes n’avaient pas eu suffisamment de temps pour apprendre la pièce qu’ils devaient jouer. Parce qu’en fait, qu’est-ce qui se passe quand on joue ? Quand on joue, évidemment, on produit des sons en conséquence de ce qu’on a lu dans la partition. Mais comment vérifier, comment être sûr, juste parce qu’on a appliqué le code entre ce qu’on a lu et ce qu’on pense que ça doit sonner ? On n’est pas seul au monde, on est quatre. Donc la question, c’est comment les quatre parties fonctionnent en cohérence les unes avec les autres. Et ça, ça demande d’avoir eu le temps d’apprivoiser les quatre parties et non pas seulement celles qu’on doit jouer. Fred : C’est-à-dire comprendre l’ensemble alors que nous, individuellement, on n’est qu’une partie de l’ensemble ? Raphaël : Exactement. Si je prends la métaphore ou le parallèle avec une scène de théâtre, une scène de théâtre chez Molière n’a aucun sens si les quatre personnages parlent en même temps. Ce qui fait du sens dans cette scène de théâtre, c’est que les comédiens apprennent pas seulement leurs répliques, mais ils apprennent aussi les répliques des autres pour pouvoir sentir à quel moment ils vont pouvoir, eux, dire leurs répliques. Et si, par exemple, Molière écrit un renvoi pour qu’en alexandrin, quelqu’un coupe la parole à quelqu’un d’autre en hémistiche, donc là, je veux dire par là, quelqu’un qui coupe la parole en respectant le nombre de pieds, celui qui coupe la parole doit savoir exactement à quel moment il doit l’apprendre, sinon l’effet est raté. Une partition de musique peut fonctionner sur ce genre de choses. C’est-à-dire que la micro-précision du timing de ce qu’on va jouer et de la hauteur des sons, etc., tout ça, vous n’y arriverez jamais si vous n’apprenez que votre partie. Vous devez apprendre la totalité de l’œuvre. Et ça, parfois, ça prend un temps conséquent, voire considérable. Et première réponse à votre question, le chef d’orchestre fait gagner du temps à tout le monde. Pourquoi ? Parce qu’il utilise un code gestuel qui montre en permanence, avec toujours le même geste, quand arrive le premier temps de la mesure. Et ensuite, le deuxième, le troisième temps ou le quatrième temps de la mesure, si la mesure est à 3, à 4 ou à 5 ou à 6 temps. Donc là, pour les gens qui nous écoutent et qui ne savent pas exactement de quoi je parle, la première matière de la musique, c’est le temps. Et la première manière qu’on a de communiquer en musique, c’est d’exprimer la pulsation, c’est-à-dire partager avec l’auditeur la régularité des événements. Ou plutôt, comment le temps est découpé en tranches égales. Fred : Est-ce que c’est pour que chaque musicien soit synchronisé, c’est ça ? Raphaël : Oui, exactement. C’est ce qui permet aux musiciens de se synchroniser parce qu’ils sentent la pulsation tous ensemble. Et donc, ça, c’est universel. N’importe quelle culture humaine dispose de cette faculté de compréhension. Je parlais tout à l’heure d’alphabet. Il n’y a pas besoin d’apprendre un alphabet pour sentir la pulsation. Et ça, c’est prodigieux. Et pourquoi on comprend tous la pulsation ? Parce qu’on est tous des êtres de chair et de rythme. C’est-à-dire qu’on a tous un cœur qui bat et on a tous appris à marcher sur deux jambes. Et on a tous observé le jour et la nuit, le froid et le chaud, la dualité. Et donc, ces événements-là, les saisons, la périodicité des saisons, tous ces événements font que la régularité de la pulsation, même s’il y a une part, comme j’en parlais tout à l’heure, d’élasticité, ça peut accélérer, ça peut ralentir. Toujours est-il que si je vous donne trois pulsations, n’importe qui autour de cette table est capable de taper la quatrième. Si je fais tac, tac, tac, vous savez quand vous devez dire tac à votre tour. Si je vous dis 1, 2, 3, vous dites 4. Il y a un autre phénomène qui est tout aussi universel, c’est qu’on appartient tous à la gravité terrestre. Donc, si je lance une balle de ping-pong en l’air, si vous la voyez, vous pouvez calculer intuitivement à quel moment elle va toucher le sol. Tout simplement parce que la balle de ping-pong et vous-même, vous êtes soumis à la même loi universelle de la gravité terrestre, et donc vous pouvez sentir ça. En fait, la musique fonctionne pareil. C’est-à-dire qu’on sent, quand il y a une pulsation donnée, comment elle se répète et se duplique à l’infini. Donc ça, c’est extrêmement puissant. C’est ce qui permet aux musiciens de s’entendre et de se comprendre souvent, parfois même dès la première rencontre. Mais le chef d’orchestre, en utilisant ce code, où il montre en battant la mesure en l’air, où il montre quand arrive le premier temps, d’un coup, il confirme et il oriente. C’est-à-dire qu’il utilise les musiciens qui sentent le temps tous ensemble. Il arrive à leur dire, on va utiliser ça en se comprenant pour aller tous ensemble donner un accent à tel endroit, pour tous ensemble ralentir de façon cohérente, tous ensemble accélérer de façon cohérente. En un mot, le chef, c’est le maître du temps. Ce n’est pas le maître du son. Si un chef dirige un orchestre qui a des gros problèmes d’instrumentarium ou alors, je dis une bêtise, un orchestre fabriqué qu’avec des boîtes de conserve ou qu’avec des légumes coupés en morceaux, ce qui existe, je vous donne des exemples tout à fait existants, il ne pourra pas obtenir le même son que s’il dirige un orchestre avec que des saxophones. Alors que dans le temps, il peut, en théorie en tout cas, il peut absolument provoquer ce qu’il veut dès lors qu’on comprend sa gestique. Et sa gestique, ça c’est prodigieux. Tous les chefs d’orchestre du monde, sans aucune exception, utilisent le même code. Tous vont battre les temps forts vers le bas. Et probablement parce que le temps fort, le premier temps de la mesure, ce qu’on appelle le temps fort, c’est le plus fort des 3 ou des 5, il est vers le bas probablement parce que c’est lui qui répond à la gravité. C’est-à-dire que c’est lui qui tombe. Et ça, ça ne vient pas de nulle part. Ça vient du fait qu’avant qu’on invente la direction d’orchestre en l’air, c’est-à-dire avec une baguette ou sans baguette, peu importe, mais c’est le même code. L’exemple le plus célèbre, c’est Jean-Baptiste Lully, 17e siècle, compositeur français, qui tapait par terre avec son bâton pour donner la mesure. Donc là, il donnait le tempo. Et en fait, il s’est blessé comme ça. Son pied a gangréné et il est mort de ça. C’est pour ça que c’est très célèbre. Mais avant qu’on invente la direction d’orchestre moderne, on est passé par cette phase-là. Donc ça, c’est la première réponse. Après, aujourd’hui, à notre époque, un chef d’orchestre, on attend de lui, qu’il fasse ou d’elle. C’est un métier qui se féminise aussi à toute vitesse. Fred : Ah justement, c’est une de mes questions. Mais, finissez sur le rôle de chef d’orchestre. C’est vrai qu’aujourd’hui, c’est très, très différent, le métier de chef d’orchestre, de ce que c’était il y a 100 ans. Ça a beaucoup, beaucoup changé, sur plein d’aspects. Mais aujourd’hui, diriger un orchestre demande d’effectivement organiser le temps de la musique, mais aussi organiser le temps du travail. J’ai trois heures de répétition. Fred : Les répétitions, la préparation. Raphaël : Pendant mes trois heures de répétition, je dois organiser les choses pour qu’à la fin de ces trois heures, on ait résolu un certain nombre de problèmes et accompli un certain nombre de réussites pour que le concert ne soit pas, entre guillemets, entaché ou réduit ou bridé à cause d’un truc qu’on n’aurait pas suffisamment travaillé. Je dois respecter les 20 minutes de pause syndicales de mes musiciens. Je dois faire en sorte que chacun ait le temps d’être à l’aise, de s’accorder, de bien jouer sa partie. Je dois aussi faire en sorte, de manière beaucoup plus subjective, que chaque musicien trouve son espace d’expression. Parce que quand on va à l’orchestre, on n’y va pas soumis à la volonté d’autrui. On y va aussi pour donner le meilleur de ce qu’on est à nous-mêmes, de ce qu’on croit, de la raison pour laquelle on a choisi d’être musicien. C’est un engagement de passion, ce métier-là. Donc on ne va pas, juste parce qu’il y a un chef d’orchestre, se dire à partir de maintenant, je ne suis qu’un exécutant. Non, non. Je dois pouvoir jouer avec mon cœur, avec mon inspiration, mes oreilles et ma sensibilité. Donc le chef doit aussi permettre, voire stimuler, voire encourager ça. Le meilleur chef d’orchestre donne aux musiciens l’impression qu’ils jouent mieux que ce qu’ils pensaient. Fred : Ça me fait venir une question. Vous avez sans doute commencé jeune, le chef d’orchestre. Vous avez devant vous des musiciens et des musiciennes peut-être plus âgés, plus expérimentés. Est-ce que c’est compliqué, justement, d’avoir ce rôle de chef d’orchestre face à des musiciens et des musiciennes plus expérimentés, plus âgés ou qui voient débarquer peut-être quelqu’un un peu jeune et qui se demande si finalement cette personne est bien à sa place. Raphaël : Bonne question. Ça dépend. Si vous êtes un jeune aspirant professionnel et que vous dirigez un orchestre d’amateurs adultes, les amateurs adultes peuvent être fiers de donner à un jeune l’occasion de faire ses premières armes. Si vous êtes tout jeune et un petit peu illégitime, si vous avez été parachuté là parce que je ne sais pas quelle manœuvre extérieure qui n’a rien à voir et que les musiciens professionnels ont l’impression d’être utilisés comme faire-valoir pour le jeune pseudo-prodige, alors là, ça va mal se passer. Mais si vous avez jeune et expérimenté, et on vous pardonnera d’être inexpérimenté, c’est normal en étant jeune, mais si vous avez une flamme ou quelque chose de pertinent ou si de votre manière d’être musicien émane une forme d’inspiration, même j’ose le mot de transcendance ou de quelque chose comme ça, ça arrive avec les enfants prodiges. On voit un gosse de 10 ans qui joue du piano, on ne sait pas pourquoi, mais ça a l’air d’être parfaitement achevé ou abouti, même si ça ne l’est pas. Vous savez, l’exemple le plus célèbre d’enfant prodige, on parle beaucoup de Mozart pour ça, mais il y en a d’autres. Dans l’histoire de la musique, il y a des compositeurs comme Mendelssohn ou Richard Strauss, mais même parfois comme Korngold. Je ne sais pas si vous avez déjà entendu parler de Korngold. Ce sont des compositeurs qui étaient, d’une manière encore bien plus prodigieux au même âge que Mozart ne l’était. Mozart n’est pas forcément le plus grand prodige de l’histoire, mais il l’était, bien sûr, extrêmement précoce et éblouissant de facilité. Mais si on regarde ses premières oeuvres qu’il a écrites quand il avait 7, 8, 10, 12 ans, c’est génial. C’est vraiment génial, mais ce n’est pas fini. Il n’y a pas encore cette maîtrise de la structure, du propos, de l’articulation, de la forme, etc. On peut être prodigieux sans être du tout accompli. Et je pense que quand on est un jeune musicien ou une jeune musicienne, on attend de vous que vous soyez convaincu et convaincant ou en tout cas habité par une vraie volonté de faire les choses, de faire du beau tout simplement. Et donc là, oui, si vous avez ça avec vous, votre âge, ce n’est plus du tout un problème ni une question. Et à l’inverse, on n’est pas toujours content d’être dirigé par quelqu’un qui a 30 ans de plus et qui se comporterait de façon professorale et un petit peu… Fred : Oui, j’imagine. Est-ce qu’il faut avoir été musicien ou musicienne soi-même pour être chef d’orchestre ? Raphaël : Oui, en tout cas, il faut avoir vraiment une appréhension de ce que c’est concrètement de jouer de tel ou tel instrument. Parce que vous ne pouvez pas indéfiniment demander à des gens de faire l’inverse de ce qu’ils savent faire. Donc si je veux obtenir de quatre cornistes une attaque très douce et très, très harmonieuse dans un registre très périlleux, par exemple dans l’extrême aiguë, si j’ignore que ça demande, par exemple, plus de pression dans l’embouchure ou une plus grande anticipation de la colonne d’air, si j’ignore la fragilité et que je leur demande comme si je tapais sur un ordinateur, humainement, ça va coincer. Bien sûr qu’ils vont se rendre compte que la personne… Mais ça ne veut pas dire que je dois moi-même jouer du cor. Mais ça veut dire que je dois quand même avoir un peu compris ce que c’est que de jouer d’un instrument avant spécifiquement du cor. Un chef d’orchestre qui demanderait au violoniste de jouer extrêmement léger au talon, c’est absurde. Au talon, c’est là que l’archet est le plus lourd. Si on veut extrêmement léger, il faut se déporter, il faut aller jouer vers la pointe de l’archet. Si on demande en permanence quelque chose qui n’est pas logique, on perd toute légitimité. Donc c’est bien de savoir quand même. Fred : Est-ce qu’il y a une formation pour devenir un chef d’orchestre ? Raphaël : Tout à fait, oui. Il y a beaucoup de classes de direction d’orchestre dans le monde. Mais il n’y a pas vraiment… Alors ça, c’est amusant. Sur mon vélo, en venant vous voir, je me suis dit… Je savais que vous alliez un peu me demander ce genre de choses. Et je me disais, mais en fait, puisque le métier de chef, il est en quelque sorte immatériel, c’est-à-dire que c’est le seul métier de musicien dont on ne peut pas toucher l’instrument, dont on ne peut pas emporter l’instrument chez soi. Fred : Et qui ne fait pas de bruit. Raphaël : C’est-à-dire qu’on n’entend pas très juste. Donc quelque part, il y a quelque chose de l’ordre de l’illusion. Ou en tout cas, c’est quelqu’un qui est un transmetteur, qui doit inspirer, qui doit rendre possible une situation, mais il n’a pas l’instrument dans les mains. Et donc, en fait, ça ne prend pas… Il n’y a pas cette espèce de cire dans laquelle on va graver toujours la même chose. Tous les violons du monde répondent aux mêmes lois. Et tous les violonistes du monde sont soumis à ces lois. Vous le voyez ou non, si vous avez 5 doigts dans chaque main et que vous avez un archet et que vous devez jouer du violon, il y aura des variables entre l’école russe, l’école franco-belge, ok, l’école hongroise, on ne tient pas exactement l’archet, pareil, etc. Mais quand même, c’est le même instrument. Alors que l’orchestre, ça n’a rien à voir avec ça. J’ai parlé de ces lois universelles, de la codification pour les mouvements de la battue, pour que le musicien comprenne le rythme. Mais vous pouvez battre avec ou sans baguette, vous pouvez faire très grands mouvements, vous pouvez faire des tout petits mouvements. Il y a mille manières de diriger un orchestre. Vous pouvez être explosif, vous pouvez être froid comme la glace. Et dans tous les cas, ça peut fonctionner. La même oeuvre dirigée par deux chefs d’orchestre qui ont deux codes gestiques opposés peut quand même répondre à ce que le compositeur attendait. Donc, rien ne ressemble… Personne ne dirige pareil. Et ça, c’est très intéressant si vous avez Internet et un peu de temps devant vous et un peu de curiosité, de regarder plusieurs fois la même oeuvre dirigée par des chefs d’orchestre différents. Souvent, ça ne ressemble pas. Il y a d’ailleurs un très beau film documentaire qui a été fait là-dessus, qui s’appelle « The Art of Conducting », où on voit l’immense distance qu’il peut y avoir pour les mêmes notes de musique que le début de la cinquième de Beethoven, qu’elles soient dirigées par Furtwängler ou par Karajan, ou qui vous voulez. Fred : Donc, si je comprends bien, c’est peut-être là l’apport principal de la personne qui dirige, c’est sur cette interprétation, la couleur qu’elle va donner, la dynamique, etc. À l’oeuvre. Raphaël : Tout à fait, ça change beaucoup de choses. Parfois aussi, on constate que si le même orchestre voit défiler deux chefs d’orchestre à une demi-heure d’intervalle dans la même salle, avec les mêmes instruments pour jouer la même musique, ça ne sera pas du tout le même son. Et ça, c’est un peu mystérieux. Les pédagogues de la direction d’orchestre sont souvent des gens qui insistent sur le fait que le plus vous maîtrisez mentalement la musique que vous dirigez, le plus vous la connaissez, et le moins vous la montrez, le mieux vous faites. C’est-à-dire qu’il y a une sorte d’inversion entre connaissance et action. Les grands chefs d’orchestre, souvent, connaissent, dans le jargon, on dit connaître son carton. D’ailleurs, ils savent exactement, parfois dans des partitions très complexes, ils savent quand même qui joue quoi. Ils savent à tel moment, ah bah oui, le troisième trompette, il joue la tierce inférieure, donc il est dans un registre défavorable, donc je vais faire plus attention à la troisième trompette que à la première trompette à ce moment-là. Alors que vous avez 85 musiciens et que le temps que je vous raconte cette histoire, la musique a déjà changé, elle est déjà ailleurs. Un tas, énormément d’informations comme ça que seul le chef d’orchestre va traiter. Plus elles sont dans sa tête et moins il va les montrer avec ses bras, parce qu’avec deux bras, on peut pas tout faire. Par contre, il y a beaucoup de choses qui vont passer dans la matrice d’une forme d’intelligence et souvent par le regard, par des micro-actions. Il faut développer un lien de confiance avec plein de personnes différentes. Donc la première qualité du chef, en fait, c’est la réceptivité. J’en suis convaincu, c’est-à-dire qu’un chef, même s’il n’a pas eu le temps de préparer la partition aussi bien qu’il le faudrait, si en situation, il est très à l’écoute de ce qui se passe et qu’il peut accompagner chaque musicien dans son effort et savoir exactement encourager quand l’effort n’est pas encore accompli ou prendre acte quand quelque chose a vraiment bien changé, etc., aiguiller le travail. De la même manière qu’un capitaine de bateau ne va pas faire toutes les actions en machine ou au service ou s’il y a des voiles à tirer ou des cordages, etc., mais saura toujours se tenir au courant de où on en est, est-ce qu’on est sur le bon cap, est-ce qu’on va à la bonne vitesse, est-ce qu’on prend des risques, est-ce que tout le monde est fatigué, est-ce que tout le monde est en pleine forme, est-ce qu’on est loin ou proche du point d’arrivée, quel azimut on suit, etc., etc. Fred : D’accord. Question tout à l’heure, vous avez un petit peu parlé de la diversité. Chez les compositeurs, les noms les plus connus, c’est des hommes. Raphaël : Oui. Fred : Et dans les chefs d’orchestre, très souvent, on voit des hommes. Raphaël : Bien sûr. Fred : Est-ce que vous avez une idée de la proportion qu’il y a de cheffes d’orchestre femmes aujourd’hui ? Raphaël : Aujourd’hui en France, c’est en explosion, c’est-à-dire que c’est vraiment une cause qui est devenue commune, si j’ose dire. La profession en entier a été sensibilisée et s’est emparée de cette question. Il y a notamment en France un encouragement à donner le podium à des femmes cheffes d’orchestre. Je ne sais plus qui a dit cette phrase célèbre « Le féminisme sera advenu le jour où on nommera des femmes incompétentes à des postes à haute responsabilité ». Je me demande si ce n’est pas Françoise Sagan, peut-être, qui a dit ça. Fred : Ou Françoise Giroud, peut-être (Note post émission, la citation est de Françoise Giroud « La femme serait vraiment l’égale de l’homme le jour où, à un poste important, on désignerait une femme incompétente » ). Raphaël : Alors, ça pourrait être Françoise Giroud. En tout cas, c’est une françoise. Là, en direction d’orchestre, c’est assez fascinant parce que c’était comme certaines institutions, le Philharmonique de Vienne notamment, qui n’a accueilli la première femme musicienne dans ses rangs que très tardivement. Et le concert du Nouvel An à Vienne n’a encore toujours pas été dirigé par une femme. Ça y est, je crois que c’est l’année prochaine ou l’année d’après, ils vont enfin le faire. Ce sont des véritables actes politiques qui consistent à faire tomber un tabou. Bien évidemment, il y a des femmes cheffes d’orchestre, et bien évidemment qu’elles peuvent merveilleusement diriger des orchestres, et bien évidemment que vous avez aussi des femmes compositrices. Dans le passé, un certain nombre ont été tenues au silence, Fred : Invisibilisées Raphaël : Complètement. Dans les classes de composition, je pense qu’on n’est plus très loin de la parité, à vrai dire. Il y a beaucoup, beaucoup de femmes compositrices très, très, très talentueuses. Et ça n’est plus une question. J’ose pouvoir le dire. En direction d’orchestre, c’est encore une question. C’est encore vraiment un effort qui est en train d’être réalisé. En France, il y a un concours qui s’appelle le concours La Maestra, qui est organisé à la Philharmonie de Paris, qui met en lumière des talentueuses femmes chefs d’orchestre. Mais les hommes ne peuvent pas concourir, donc c’est une forme de discrimination positive qui est dans ce concours-là, comme si ça consistait à contrebalancer les effets de l’histoire. Et ça, c’est un sujet passionnant et infini. On ne va pas régler cette question-là autour d’une table ce soir. Fred : Non, non, ma question, c’était vraiment aujourd’hui, combien il y en a et ce qu’il y a de choses qui sont faites. Raphaël : Absolument, il y a beaucoup de choses qui sont faites et aujourd’hui, je crois que le pourcentage de programmation de femmes cheffes d’orchestre, en tout cas à la Philharmonie de Paris, est passé au-dessus de 20%, alors qu’il était en dessous de 5% il y a encore 15 ans. Donc vous voyez, ça va à toute vitesse. C’est vraiment… Et c’est une tendance très générale. Fred : Alors, juste avant la pause musicale, je voulais vous lire une citation d’un chef d’orchestre, de l’Orchestre Philharmonique de Boston, envoyée par mail juste avant l’émission. Quand j’ai préparé, ça m’avait fait penser à cette conférence que Benjamin Zandler a donnée il y a quelques années sur la musique et la passion. À un moment dans cette conférence, il dit « J’ai eu une expérience extraordinaire, j’avais 45 ans, j’étais chef d’orchestre depuis 20 ans déjà. Et j’ai soudain réalisé qu’un chef d’orchestre ne fait pas de son. Ma photo était sur les CD, mais le chef d’orchestre ne fait pas de son. Il dépend de sa capacité à rendre les autres puissants. Ça a tout changé pour moi, ma vie a changé. Les gens de mon orchestre me disaient « Qu’est-ce qu’il y a ? » C’est ce qui s’est passé. J’avais réalisé que mon boulot, c’était de créer des possibilités chez les autres. Et bien sûr, je voulais savoir si j’y arrivais. Et vous savez comment le savoir ? Regardez leurs yeux, s’ils brillent, vous savez que vous avez réussi. » Je vais vous faire juste réagir sur cette citation. Raphaël : J’aime beaucoup, c’est magnifique. C’est surtout très beau de dire « mon métier consiste à créer des possibilités ». Effectivement, cette espèce de mythe de toute puissance, il repose quand même sur des énergies qui sont portées par tout le monde, sauf par le chef d’orchestre. Après, bien évidemment, diriger, c’est fédérer. Et donc, ça consiste à aligner les personnalités, à les encourager à donner le meilleur en cohérence les uns avec les autres. Moi, je ne dirais pas que c’est dans leurs yeux brillants que je vérifie qu’ils sont tous bien à présent. Je dirais qu’il y a plusieurs manières de le vérifier. Un orchestre, c’est idiot, mais c’est très parlant. Quand vous réussissez à augmenter le volume sonore d’un orchestre, ça veut dire que les gens ont senti qu’ils pouvaient donner plus. Donc, ça veut dire qu’il y a un certain nombre de leviers, ou de verrous plutôt, qui ont sauté, c’est-à-dire des verrous de confiance. Les timbaliers, les trompettistes qui disposent des instruments les plus puissants de l’orchestre, passent une énorme partie de leur temps à faire attention à ne pas jouer trop fort. Pourquoi ? Parce que si c’est trop fort, ça va déranger beaucoup de gens, etc. Seulement, on a quand même besoin de cette puissance par moment, et en réalité, si tout le monde sent la pulsation, si tout le monde sent où on va, alors ils vont pouvoir respirer mieux, donc donner plus de puissance sans que ce soit agressif, sans que ce soit dérangeant, etc. Donc, ça c’est un premier marqueur. Plus généralement, effectivement, on peut lire des choses dans les yeux, mais en répétition, c’est assez vertigineux le différentiel qu’on peut sentir en quelques minutes, parfois. Si vous êtes dans un bon jour, si les musiciens vous accueillent, et si ce que vous proposez va être pris, va être entendu, et que vous arrivez à convaincre, il faut vraiment convaincre. C’est un métier de rhétorique et d’éloquence, bien sûr. Alors là, vous allez entendre des énormes différences en très peu de temps, et vous saurez que vous n’avez pas prêché dans le désert. Vous saurez que les musiciens ont compris ce que vous voulez, et que même s’ils ne vous rendent pas ce que vous attendiez, ils ont joué le jeu, si je puis dire. Et là, vous vous dites, ok, il se passe quelque chose, on est tous ensemble. Le métier de chef est un métier de solitude. C’est souvent très difficile. Quand vous vous sentez justement à l’inverse avec l’orchestre, et non pas contre l’orchestre, la solitude, c’est le soir à l’hôtel. Mais pendant que vous êtes en répète, tout va bien. C’est très étonnant, ça. Fred : D’accord. Alors on fait une petite pause musicale avant de passer à la partie orchestre à vélo. Justement, comme on va parler un peu d’orchestre à vélo, j’ai fait un choix musical, mais je vais vous laisser l’expliquer, parce que c’était un enregistrement qui a été fait au moment du confinement, je crois, il y a quelques années, avec notamment des élèves de plusieurs collèges, notamment de Bobigny, de Paris, de Pierrefitte. Et c’est la célèbre chanson À bicyclette qu’a chantée… Raphaël : Yves Montand. Fred : Voilà. Et donc c’était fait à distance, parce que chacun des musiciens et musiciennes étaient chez elles et chez eux. Raphaël : Exactement. On a préparé d’abord la bande son. Alors moi j’avais écrit des arrangements. Pendant le confinement, on avait tous du temps libre, on pouvait faire ça. J’avais écrit l’orchestration et les arrangements, et j’avais envoyé des parties séparées à chaque musicien qui était chez soi, en leur demandant de suivre le tempo unique, donc d’un clic, en leur disant exactement voilà une démo, vous devez jouer avec les oreilles avec un casque, pour jouer, pour être précisément calé là-dessus, sinon ça ne marche pas. Même en faisant ça, il y a quand même toujours des petits besoins de réajuster, c’est un gros travail de post-production, de mixage, d’édition. J’avais beaucoup de chance, parce que c’était Dimitri Scapolan, qui est ingénieur du son à Radio France, qui avait accepté de faire ça. Et une fois qu’on avait cette maquette, avec tous les musiciens de l’orchestre, que l’on voit d’ailleurs à l’écran, chacun chez lui ou chez elle, et bien je suis effectivement allé avec ma petite enceinte et mes petits micros tout seul, avec mon vélo cargo, j’ai mis tout ça dans mon vélo cargo, et je suis allé effectivement au collège Pierre Semard de Bobigny, au collège Suzanne Lacore de Paris 19ème, au collège Gustave Courbet de Pierrefitte, on avait préparé ça avec les profs, et les collégiens ont chanté. Alors sur les images, sur cette vidéo que l’on trouve sur les réseaux, sur Youtube, on les voit malheureusement avec le masque, parce que tout le monde était masqué au collège. Et c’était un peu un crève-cœur de devoir les motiver pour chanter avec ce masque, donc forcément derrière un masque on est tenté de marmonner, si on n’a pas très envie de chanter à pleine voix, bon. Mais je trouve ça très émouvant, ça paraît tellement loin derrière nous, cette époque du confinement, où quand même, il en allait de notre survie, il fallait rester créatif, il fallait pas laisser la musique s’endormir, sinon on risquait de ne plus jamais la retrouver. Et toute la profession a redoublé d’inventivité, ça a vraiment fait changer beaucoup de choses dans le métier, la pandémie. Fred : Alors on va écouter ça, sur la fiche de l’émission, sur le site causecommune.fm dans l’émission Chemins de traverse , j’ai mis le lien évidemment de la vidéo Youtube, donc c’est à bicyclette, orchestration Raphaël Merlin, on se retrouve dans 3 minutes, belle soirée d’écoute de Cause Commune, La voix des possibles . [ Diffusion de la pause musicale ] Voix du jingle (Laure-Élise Déniel) : Cause Commune, 93.1. Nous venons donc d’écouter À bicyclette , orchestration de Raphaël Merlin, et on entendait les voix de collégiens et de collégiennes du collège Pierre Sémar à Bobigny, du collège Suzanne Laccore à Paris du collège Gustave Courbet à Pierrefitte-sur-Seine. Et vous êtes toujours sur Cause Commune, émission Chemins de traverse , donc on va attaquer la dernière demi-heure, même les 25 dernières minutes, donc toujours avec Raphaël Merlin, violoncelliste, chef d’orchestre, compositeur. Alors si on a mis À bicyclette , c’est pas pour rien, parce que c’est une des chansons, un des morceaux qui est joué notamment par l’orchestre des Forces Majeures qui se déplace notamment à vélo, donc on va terminer notre échange sur cette partie-là, donc de présenter ce qu’est cet orchestre Les Forces Majeures et c’est quoi ce principe de se déplacer à vélo. Raphaël : Alors Les Forces Majeures , ça date de 2014. En 2014, la ferme de Villefavard-en-Limousin, où était en partie le festival du Haut-Limousin, me demande, par la voix de son directeur, est-ce que tu peux réunir un orchestre pour deux concerts ? Pour moi, c’était un moment très important de réunir des musiciens en qui je croyais profondément pour ce genre de projet et j’avais vraiment, avec insistance, voulu réunir des musiciens qui étaient eux-mêmes actifs comme musiciens de chambre, c’est-à-dire des musiciens qui viendraient, ils étaient pour ce projet-là à environ 35, mais dans leur vie quotidienne jouant soit du quatuor, soit du trio, soit du quintet, c’est-à-dire des petites formations sans chef justement, c’est-à-dire des gens capables et surtout très aguerris et très habitués à fonctionner comme des émetteurs-récepteurs, c’est-à-dire à la fois force de proposition et à la fois très à l’écoute. Cette espèce de double fonctionnement que tous les musiciens de chambre pratiquent, que les jazzmans pratiquent aussi, ce qu’on appelle le interplay, c’est toujours cette interactivité très intense dans le jeu et ça, j’en suis certain, quand vous avez peu de temps, que le projet est assez ambitieux et tout, souvent il y a une démultiplication de l’efficacité en musique parce que les gens d’un coup prennent une partie du résultat vraiment à cœur et avec, ils s’emparent de la chose, donc tout le monde est très impliqué, ça produit des petits miracles. Et puis les premières années de cet orchestre, moi j’étais très actif avec le Quator Ébène, on réunissait l’orchestre en été pour la première année deux concerts, la deuxième année, deux concerts plus un enregistrement, la troisième année, l’enregistrement avait eu un certain succès donc on a eu quand même plus de concerts, ça s’est développé mais ça n’a jamais été un orchestre qui a été occupé à plein temps, c’est resté un orchestre qu’on appelle un orchestre de projets, c’est-à-dire on se retrouvait ponctuellement et puis en 2016, il y a eu une très jolie accumulation, on a dû faire une dizaine de concerts, mais on n’a jamais dépassé 10 concerts par an en tant qu’orchestre. Seulement, pendant cette période-là, avec le quator, je faisais le tour du monde un peu dans le désordre, notamment les tournées américaines m’avaient beaucoup sensibilisé à cette absurdité de la dépense de kérosène, de carbone, pour un business qui, tout bien considéré, est un business… C’est pas vital de faire des concerts de quator. Après, bien sûr, moi j’y crois profondément, mais je vois pas l’intérêt de faire… Fred : D’aller si loin peut-être. Raphaël : Si, mais si on y va, il faut rentabiliser le voyage en tout cas. Si on va jouer en Californie, on va faire 20 concerts en Californie et puis peut-être qu’on va faire 20 autres concerts sur le chemin du retour mais si on va en Californie, ça sert à rien de retourner jouer à New York pour retourner encore en Californie ensuite. Et alors là-bas, ça posait aucun problème à personne. Il se trouve que les États-Unis, c’est un pays très vaste où l’avion est presque le moyen de transport principal donc c’est très compliqué d’aller contre la puissance de… Là, c’est un sujet de géopolitique en fait. Mais moi, ce qui me choquait, c’était pas ça. Ce qui me choquait, c’était plutôt le refus d’en parler, cette espèce de tabou. Parce que c’est quand même le ou un des défis, voire le défi de notre époque c’est comment ne pas finir sur une poêle à frire comme disait un grand Premier ministre de notre Vème République qui des années après est devenu ambassadeur au Pôle, donc il savait de quoi il s’agissait. Aujourd’hui, ce sujet-là, il est très difficile en fait à nommer. Très souvent, alors que c’est pas invisible, les journaux, les grands médias en parlent, mais on est tellement impuissants. Et donc je vivais ça avec une vraie dissonance intérieure. Moi, j’avais été éco-anxieux, très gamin, tout petit, donc devenu musicien, très fier. Et ça qui est aussi difficile, c’est que le voyage et l’avion sont synonymes de réussite. Donc quand on vous dit, vous allez prendre l’avion pour votre boulot, la première chose que vous vous dites, c’est pas je vais écramer mon empreinte carbone annuelle. C’est le contraire. Vous vous dites, super, je suis demandé. Je vais jouer en Pologne, je vais jouer aux Etats-Unis, c’est la gloire. Et en fait, là, il y a un récit qui est en train de bouger un peu. Et ça m’avait beaucoup, beaucoup fait réfléchir. Je ne le vivais pas très bien. Et donc j’ai dit ça vraiment sur un coin de table, en y croyant à moitié. J’ai dit à mon directeur de l’époque « pourquoi on ne fait pas des tournées à vélo ? » Je rentrais d’une tournée de trois semaines où j’avais dû prendre quinze fois l’avion. J’adorais prendre l’avion en plus. Quel plaisir ! Mais bon, enfin, il faut de temps en temps accepter qu’intellectuellement, c’est parfois un effort de chercher la cohérence, tout simplement, entre les actes et les convictions. Bref. Fred : C’est pas simple non plus, de toute façon. Raphaël : C’est déjà pas simple. Et alors, pour ce sujet-là, c’est particulièrement compliqué. Mais il m’a entendu, le gars. Moi, je dis ça en me plaisantant. Pour moi, je faisais du vélo. Une fois que j’étais rentré, que j’étais en vacances, je partais faire de la randonnée avec des copains. Et en fait, un jour, il m’appelle et il me dit « je te l’ai faite ta tournée à vélo ». L’orchestre va faire une tournée à vélo. C’était une petite tournée, mais c’était l’opus zéro. Je peux vous dire exactement, le 28 juillet 2018, entre Vichy et Clermont-Ferrand, Les Forces Majeures , on était 35, on avait 4 concerts avec des vélos électriques prêtés par la communauté de commune. Et 20 kilomètres entre chacun de ces concerts, des vrais concerts symphoniques. Avec Le beau danube bleu , Les danses hongroises de Brahms, voilà, du grand répertoire. Fred : Et dans quel type de lieu ? Raphaël : Un peu de tout. Sur la place, devant l’opéra de Vichy, ensuite à la mairie de Pont-du-Château, il y avait un mariage, c’était marrant comme tout. On a joué aussi dans le parc de Randan, sous les arbres magnifiques. Et le soir, place de la Victoire à Clermont-Ferrand, devant la cathédrale, il y avait pas mal de monde. Et cette journée a montré les limites de l’exercice, mais a aussi montré l’incroyable démultiplication des énergies, du plaisir. Quand vous avez vraiment 40 personnes qui ont pédalé ensemble et qui ont partagé cet effort, mais aussi tout simplement cet esprit de camaraderie, de caravane, et que ça se retrouve en musique au moment M, il y a des choses qui se dénouent, qui se délisent, ça a libéré beaucoup d’énergie. Donc ça, ça m’a marqué, je me suis dit bon, il faudra refaire ce genre de choses, mais je savais pas encore trop comment. Et ensuite, effectivement, la vie a fait son oeuvre, il y a eu la pandémie, beaucoup de temps pour réfléchir. Et on m’a présenté, ensuite, alors que l’orchestre était en totale recomposition, l’équipe se recomposait à la fois pour les artistiques mais aussi pour l’encadrement, l’équipe administrative. Et on m’a présenté un bon génie, c’est-à-dire un homme qui, à lui tout seul, a pu aligner tout ça. Il s’appelle Robin, et il est à la fois un cycliste passionné et expert, il est à la fois un producteur de musique classique extrêmement agile, capable, avec des bouts de ficelle, en allant dans les territoires les plus sinistrés ou les plus abandonnés, dans lesquels jamais un orchestre n’est passé, capable de convaincre, d’articuler les choses, de les rendre désirables à des gens à qui ça aurait fait peur. Et à lui tout seul, il a réussi ce miracle. Alors bien sûr, il n’est pas tout seul. Moi, j’ai fait ma part, je suis dans cette histoire-là, je m’occupe des arrangements, des orchestrations, de recruter les musiciens, de faire travailler l’orchestre. Mais dans la production, le génie et l’insistance et la persévérance dont il a fait preuve ont fait que, en quelques années, l’orchestre est devenu spécialiste et équipé et compétent et même expert dans la cyclologistique appliquée à la tournée d’un orchestre symphonique. Si bien qu’aujourd’hui, on part, on est trente, dont une vingtaine de musiciens, plus une équipe, un staff, avec tout le monde à vélo, tous les instruments sont dans des carrioles qui ont été designées, construites… Fred : Parce que je suppose qu’il faut des vélos un peu spéciaux, avec des carrioles derrière… Raphaël : Bien sûr, des carrioles qui sont exprès dimensionnées… Fred : Faut aussi protéger les instruments. Raphaël : Absolument, les protéger des intempéries et des vibrations. Les vibrations sont très dangereuses pour les instruments à cordes, mais pas seulement. On a trouvé des timbales en fibre de verre ultra légères par rapport aux timbales symphoniques. On a une contrebasse qui voyage sur sa propre remorque. Donc là, il a fallu fabriquer cette remorque exprès pour, etc On a fait la première grande tournée en région, c’était de la montagne, Grenoble-Genève. Donc là, on avait tous des vélos électriques. Mais en 2024, on a été dans des départements beaucoup moins montagneux, donc on a eu des vélos musculaires, etc. etc. C’est une aventure humaine absolument irremplaçable et inattendue. Moi, dans ma vie, je ne pensais pas que j’allais vivre un truc pareil. J’estime que ça relève du miracle. Fred : Ça a renforcé la cohésion de l’orchestre ? Raphaël : Oui, profondément. Il y a des exemples de musiciennes ou de musiciens qui ont témoigné que ce projet-là leur permettait d’aborder toute leur profession avec une autre vision, c’est-à-dire que ça donnait du sens à un métier qui, parfois, peut en perdre du sens. Parce que là, on se retrouve… Tout vole en éclats. Les contrats d’exclusivité qui font qu’un orchestre ne peut pas jouer deux fois de suite le même programme à moins de 400 km d’écart… Parce que ce sont des grosses sommes d’argent qui sont mises en… Quand il y a un très grand orchestre, si je vous prends l’exemple d’une tournée… L’orchestre de Chicago part en tournée mondiale, il va s’arrêter en Europe. Si la ville de Francfort achète un concert, vous pouvez être sûr que la ville… En banlieue de Francfort, personne ne va mettre autant d’argent pour avoir le même concert. Il va y avoir des conflits, la billetterie… Donc il va falloir faire 300 km de train pour proposer le même programme à Cologne, puis ensuite à Berlin, ensuite à Prague, et après vous rentrez à Chicago. C’est des trucs énormes. Nous, c’est l’inverse. On est à vélo, on fait 20 km, 40, 50 km, grand maximum par jour. Donc de toute façon, notre public, s’il a une voiture, il peut se déplacer, il peut entendre deux fois le même concert, il n’y a pas de problème. Fred : Et est-ce que vous avez justement du public qui vous suit à vélo ? Raphaël : Oui, c’est une des raisons pour lesquelles on fait tout ça, bien sûr. En fait, on veut sensibiliser le monde musical à la mobilité douce et à une certaine audace de s’emparer des problématiques contemporaines, mais on veut aussi sensibiliser tous les clubs cyclistes et tous les villages qu’on traverse à la musique classique. Très souvent, on trouve des auditeurs qui n’ont jamais vu un violon de leur vie, jamais entendu le son d’un instrument acoustique. Fred : Parce que vous allez dans des endroits où ces gens-là sont, ils n’ont pas besoin de se déplacer dans une salle d’orchestre. Raphaël : C’est ça, on sillonne la ruralité. Un des plus beaux souvenirs que j’ai, c’est un concert dans l’école de Laval-en-Beldonne. Là, on est dans le massif de Beldonne, derrière Grenoble, et il faisait un temps magnifique, et tous les enfants venaient avec leurs parents, c’était en altitude, on avait grimpé. Là, je peux vous assurer qu’à Laval-en-Beldonee, jamais un orchestre symphonique n’avait fait un concert. Et l’accueil, l’enthousiasme, le fait de partager ça, et puis les enfants, de les faire chanter avec nous, ça, c’est des expériences qui font vibrer pendant des années, après. Donc, on a pas ménagé nos efforts, il y a beaucoup de travail, d’anticipation, tout ça. Cette année, en 2025, on va faire Paris-Roubaix sur cinq semaines. Fred : C’est plus de 400 kilomètres, ou 500. Raphaël : En plus, on ne fait pas le vrai Paris-Roubaix. Fred : C’est ma question, vous allez passer sur les… Raphaël : On va peut-être passer sur les pavés pour l’anecdote, pour rigoler, mais en vrai, on va jouer partout. On va jouer à Lens, à Amiens, à Arras, à Compiègne. Fred : Donc ça, c’est du 9 mai au 8 juin 2025. Raphaël : C’est le gros événement 2025 des Forces Majeures . Il y en aura d’autres, mais c’est la grande tournée, c’est la plus longue qu’on a jamais entreprise. Fred : Précisons, parce que le temps avance vite, et je voudrais qu’on parle aussi de la partie musiciens, musicennes amateurs, parce que c’est l’orchestre des pros, entre guillemets. Mais Accordez vos vélos , parce que le projet s’appelle Accordez vos vélos , réunit aussi des musiciens et des musiciennes qui ne sont pas du tout professionnels. Notamment, c’est comme ça qu’on vous a connus, avec mon fils Lilian et mon épouse altiste Coralie, quand vous avez fait Saint-Denis-Paris, deux années de suite, avec des musiciens et des musiciennes qui ne sont pas professionnels. Raphaël : Tout à fait. Le noyau des musiciens professionnels est réuni pour que des musiciens et des musiciennes amateurs, et des choristes également, puissent s’agglomérer et venir jouer des parties d’orchestre, parfois qui peuvent faire peur, qui peuvent être difficiles, mais quand vous êtes encadré et entraîné par des professionnels, il y a beaucoup de problèmes qui peuvent disparaître, il y a même plein de solutions qui peuvent apparaître. Ça, c’est un phénomène absolument fascinant. Les amateurs se rendent compte qu’ils peuvent participer à un projet bien plus difficile que ce qu’ils auraient estimé être capable de réaliser, donc ils sont galvanisés par cette espèce de surpassement, et les professionnels sont eux aussi galvanisés parce qu’ils se sentent investis d’une responsabilité plus grande, puisque sur eux repose le fait que les amateurs vont pouvoir vraiment accomplir l’exploit. Donc en fait, ça c’est vraiment gagnant-gagnant. Je ne dis pas qu’on peut tout faire comme ça, mais quand on se fixe des objectifs un peu trop ambitieux, avec ce genre de mise en résonance, on peut quand même y arriver. Et c’est vrai que les concerts qu’on a donnés, on en a déjà donné trois à la Canopée des Halles à Paris. Les trois fois avec l’aide de la MPAA, la Maison des pratiques artistiques amateurs, eh bien, on avait environ 20 pros pour 60 amateurs, et on a vraiment joué des pans du répertoire qui sont très exigeants. On a quand même donné Un Américain à Paris de Gershwin, on a donné une pièce rare de Prokofiev qui s’appelle La rencontre de la Volga et du Don , il y a eu Le beau Danube bleu , il y a eu des choses qui sont affiliées vraiment au très très grand répertoire, des extraits de Scheherazade, de Rimsky-Korsakov, enfin c’est des choses que, effectivement, c’est du grand grand répertoire symphonique. On le fait pas très souvent, parce que ça c’est un projet très difficile à coordonner, qui demande beaucoup beaucoup de préparation. Mais à chaque fois, on est très fiers parce que je crois qu’on partage ça justement, il n’y a pas seulement la notion de transversalité entre pros et amateurs, il y a aussi une grande grande transversalité de tranche d’âge, parce qu’on a des tout jeunes musiciens, on a même des collégiens du collège Rognoni, beaucoup qui viennent maintenant très souvent jouer avec nous dans nos rangs. On a des collégiens qui viennent chanter, ça on en a parlé déjà tout à l’heure, ceux qu’on a entendu chanter à bicyclette de Bobigny, de Paris, de Peyrefitte, ils ont été invités à venir chanter avec nous au Halles aussi, donc il y avait ce grand rassemblement, et puis la mairie de Saint-Denis aussi est très impliquée parce qu’on a plusieurs fois donné les mêmes programmes de concerts, aussi à Saint-Denis, devant la mairie, sur la place, et il y a un symbole là-dedans. Le vélo et l’orchestre, bien sûr, comme trait d’union entre la banlieue et le centre, l’hyper-centre, toute cette vision pyramidale de la France et de l’Île-de-France, qui fait un peu voler en éclats le fait qu’on ne ferait pas la même musique de part et d’autre du périph’, en fait on peut tout à fait. C’est vrai qu’on n’est pas reçus pareil, à quelques kilomètres d’intervalle c’est pas les mêmes publics, c’est pas les mêmes attentes, c’est pas la même couche urbaine, mais la musique fait partie des pratiques les plus universelles du monde, donc de la fascinante capacité de l’être humain à inventer des trucs pour communiquer, parmi ces trucs-là, je crois que la musique tient une bonne part, et depuis toujours. Alors peut-être que des personnes qui nous écoutent se disent j’aimerais bien participer, et je crois que ça tombe bien, parce que je crois que Raphaël : « je crois je suis libre le 9 mai, que je peux venir jouer à La Canopée des Halles », bien sûr. Fred : Voilà, le 9 mai, il y aura La Canopée des Halles, alors ce coup-ci ce ne sera pas à vélo, ce sera juste à La Canopée. Raphaël : Cette année, il y a le concert seulement. La déambulation à vélo, ce n’est pas toujours quelque chose qu’on propose, ça n’empêche pas du tout aux musiciens de venir à vélo, mais on n’organise pas cette année cette espèce de marathon où on fait le même jour le concert du matin aux Halles, la traversée et le concert du soir à Saint-Denis, ou l’inverse. Cette année, on fera, je crois que c’est un vendredi le 9 mai, ou un samedi, à vérifier, mais je crois que c’est un vendredi, on jouera aux Halles et on jouera à Saint-Denis le lendemain. D’accord, donc le 9 mai aux Halles, le 10 mai à Saint-Denis, et donc sur le site des Forces Majeures , sur les réseaux sociaux des Forces Majeures , et aussi sur la page de l’émission du jour dans causecommune.fm, fiche Chemins de traverse , vous trouvez l’appel à participation , donc vous retenez bien, les personnes qui nous écoutez, vous n’avez pas besoin d’être une professionnelle de la musique. Raphaël : Pas du tout, au contraire. L’intérêt, c’est de venir avec plaisir et sans du tout de niveau prérequis. C’est vraiment… La métaphore que j’aime bien utiliser pour ça, c’est le vol d’oiseau migrateur, c’est-à-dire que si l’oiseau qui est en tête gigote bien les ailes et suit la bonne direction, tous les oiseaux qui sont derrière n’ont qu’à imiter. Et chacun imite à sa mesure comme il peut. En fait, l’orchestre n’est pas une affaire d’excellence verticale, c’est une affaire de transmission horizontale. Et très souvent, on se rend compte qu’on arrive par le nombre à réaliser ce que l’excellence ne peut pas faire tout seul. Fred : J’ai une petite question sur le salon web. Est-ce que c’est pour tous les instruments ? Raphaël : Tous les instruments de l’orchestre. Oui, de l’orchestre symphonique. Mais si vous jouez du piano ou de la flûte à bec ou de la guitare classique, c’est plus difficile. Parce que cette année notamment, on va jouer des extraits du répertoire qui sont des… Beethoven, Bizet, Mendelssohn. Effectivement, il n’y a pas de partie d’harmonica dans cette musique-là. Donc c’est pas tout à fait pour tous les instruments. Cela dit, on a souvent fait des arrangements pour pouvoir accueillir des instruments qui n’étaient pas prévus au départ. C’est souvent très réjouissant. Je me rappelle avoir écrit des parties de saxophone pour une chanson que j’avais orchestrée, je ne sais plus laquelle. Donc oui, on peut faire des arrangements. Fred : D’accord. Alors on arrive vraiment à la fin de l’émission. Peut-être que je vous laisserai si vous avez quelque chose à rajouter. Mais on a toujours une question finale qu’on aime bien poser à nos invités. Est-ce que vous auriez envie de partager quelque chose qui vous a fait du bien dernièrement ou qui vous a émerveillé ? Une ou plusieurs choses. Raphaël : Oui, bien sûr. De toute façon, le métier que je pratique maintenant, parce que le temps a transformé ma vie professionnelle. Aujourd’hui, mon activité principale, c’est vraiment chef d’orchestre. C’est-à-dire que je continue à écrire, je continue à enseigner, je continue à jouer du violoncelle, mais la direction d’orchestre c’est mon principal lieu d’expression. Et dernièrement, j’ai eu plusieurs expériences qui m’ont beaucoup, beaucoup marqué. Je dirais que si je dois en retenir… J’ai envie de vous raconter plein de trucs. Récemment, on a donné à Genève, qui est la ville dans laquelle je travaille le plus souvent, parce que je suis directeur musical de l’orchestre de chambre, là-bas. Et en janvier, de retour des vacances, on a donné un programme 100% autour de la personnalité de Clara Schumann, qui était donc la femme de Robert Schumann. On a entendu des oeuvres écrites par Clara, écrites par son beau-frère Woldemar Bargiel, et par Robert. Et j’ai en fait parcouru la troisième symphonie de Schumann avec un plaisir très intense, parce que pour moi, cette musique, elle a quelque chose d’impossible. Schumann, c’est un des langages du grand répertoire classique, où en fait, on dirait, je trouve, que la vivacité des idées et l’intensité de la poésie qu’il y a dans cette musique est toujours un peu trop pour ce qu’on peut vraiment faire avec un instrument. J’ai toujours l’impression que c’est pas accessible. On mouille la chemise, on s’efforce d’arriver au plus près, mais c’est une musique qui a une longueur d’avance sur ce que l’humain peut véritablement faire. Moi, je ressens quelque chose comme ça. Et j’ai senti quand même qu’avec l’orchestre, ce soir-là, au concert, ça n’a pas toujours été le cas, mais par moments, on s’est un peu envolés. Et c’est difficile de prouver que c’est pas un délire dont je vous parle, que c’est pas moi qui ai eu une sorte d’hallucination. Mais j’ai eu un peu une sensation comme ça. C’est très intérieur, et c’est difficile à partager. Mais justement, puisque c’est difficile à partager, c’est la première chose qui me vient à l’esprit, parce qu’au fond, c’est ce qui m’anime. Je dois convaincre toujours que ce que je crois avoir pressenti, ce en quoi je crois, je veux le partager. En fait, ce métier, c’est un métier d’émerveillement, de disponibilité et de partage, absolument. Il y aurait plein d’autres trucs que j’aurais envie de vous dire. Si je rétro-pédale un peu dans le temps, en début de novembre, j’ai dirigé Le Requiem de Fauré, qui est une oeuvre très célèbre, très simple et en même temps très profonde. Et on avait décidé, cette soirée-là, de la proposer au public dans le noir. Pas dans le noir total, mais avec un minimum de lumière. Et ça a provoqué quelque chose. En fait, les sens qu’on a, nous, humains, ils interfèrent les uns avec les autres. Donc, quand vous soulagez la vue, en fait, vous augmentez la possibilité d’écouter. Et on s’en rend très bien compte la nuit. Si vous vous levez la nuit, vous dormez quelque part dans un appartement que vous ne connaissez pas, par exemple, ou alors, carrément, dehors, vous bivouaquez, il n’y a pas de lumière, il y a juste le bruit de… Dans le noir, vous êtes rendus à votre état sauvage. D’un coup, vous ne savez pas où est l’interrupteur, vous ne pouvez pas allumer, vous écoutez beaucoup mieux. Et cette intensité de l’écoute pour la musique, c’est ce qu’il y a de plus beau. Voilà aussi quelque chose que j’ai vécu dernièrement et que j’ai bien envie de… Voilà, bon, mais… Fred : Non, mais c’est très bien. Et peut-être que, d’ailleurs, actuellement, il y a des auditrices et des auditeurs qui nous écoutent dans le noir. Raphaël : Exactement, éteignez la lumière ! Fred : Alors, si, notamment, ma plus jeune fille est en train d’écouter, il faut lui dire d’aller se coucher dans, allez, même pas deux minutes. Raphaël : Voilà. Fred : Donc, on entend la musique de générique de fin, donc c’est Schmaltz par Jahzzar. ] Un grand merci, Raphaël Merlin, pour le temps que vous nous avez consacré et puis pour tous ces émerveillements que vous faites avec vos projets et vos orchestres. Raphaël : Merci. Fred : Donc, l’émission est en train de se terminer. Vous pouvez écouter, vous abonner au podcast, à la lettre d’actus de l’émission. Les infos sont sur causecommune.fm. Chemins de traverse est en direct tous les mercredis à 22h. Donc, juste après l’émission à 23h30, l’émission inédite de Minuit Décousu qui nous emmène dans une traversée radiophonique où on ne fait pas de quartier, « Des quartiers villages aux dalles de béton, des quartiers populaires, des quartiers de haute sécurité, des quartiers disciplinaires en tôle, des boutiquiers fascistes à bouter hors des rues. Bref, pendant une heure, on fait le tour des quartiers ensemble en ouvrant grand les oreilles ». C’est l’émission Minuit Décousu à 23h30. Chemins de traverse , on sera sans doute là mercredi prochain, le 12 février. On ne sait pas encore avec quel invité. Et au pire, si nous n’avons pas d’invité, nous ferons une rediffusion. Je vous rappelle que si vous voulez nous rencontrer, il y a la soirée Cause Commune , vendredi 7 février 2025 à partir de 19h30 au studio de la radio, 22 rue Bernar Dimey, dans le 18e arrondissement de Paris. Donc n’hésitez pas à passer. Salut et solidarité ! Intervenir en direct Vous pouvez nous rejoindre sur le salon web de l’émission pour participer à notre discussion en direct, nous contacter ou nous laisser un commentaire. Pendant le direct, vous pouvez aussi nous appeler au 09 72 51 55 46…
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